Remontée de la Cavichja depuis Monte Estremu et la prise d'eau

Nous n'avons pas trouvé mieux pour organiser ce début de raid que de nous donner rendez-vous ce Mardi 23 juin 2015 au supermarché Casino de Corte pour finir les courses, puis de laisser ma voiture devant la gare pendant les cinq jours prévus du séjour. En effet, Olivier avait réussi à se faire prêter un 4x4 de compétition (merci Dumè !) qui doit nous permettre d'emprunter la piste de Monte Estremu jusqu'à la prise d'eau en nous faisant gagner près de 2h à l'aller et presque autant au retour. Nous finissons donc le trajet aller pour rejoindre Barghjana où nous nous arrêtons au Bar des Amis nouvelle mouture, refait et modernisé. Pause-déjeuner sur la base bières/sandwiches avec des sandwiches tellement énormes que je ne finirai le mien qu'au dîner en fin de journée...
Départ ensuite pour Monte Estremu où nous sommes bien aises de constater que la barrière de la piste est bien ouverte comme escomptée, puis parcours sans encombre de la piste (en bien meilleur état qu'en 2009) pour atteindre la prise d'eau aux alentours de 15h. Ultimes préparatifs de sacs ensuite avec décision de ne prendre que le minimum de matériel d'escalade (cordelette de 30mm, coinceurs/friend, sangles, mousquetons, pas de baudriers) puisqu'il n'était plus question de descendre le ravin de la Solitude avec rappels éventuels. En effet, nous avions projeté de faire le lendemain une étape très lourde avec remontée de la Combe Rouge, traversée de Bocca a u Purtellu jusqu'à Bocca Tumaginesca, puis descente du Ravin de la Solitude pour boucler le parcours. Cela supposait que l'on puisse trouver un bivouac en bas de la Combe Rouge (info d'Achille sur une grotte-bergerie dans cette zone), puis que l'on puisse accéder au Cirque de la Solitude. L'accident du GR20, survenu quelques jours avant notre séjour (Corse Matin - Accident dans le Cirque de la Solitude le 10 juin 2015) avec finalement 7 morts retrouvés dans le ravin, a entraîné la fermeture du Cirque et la déviation du GR20 par la Pointe des Eboulis et a bouleversé notre programme initial, nous obligeant à nous rabattre sur une remontée partielle du ravin depuis le bas (sans aller trop haut, de peur de tomber sur des cadavres ou de nuire aux opérations de recherche).

A 15h30, le départ par le gué sous la prise d'eau demande un peu d'adaptation au poids des sacs et, en ce qui me concerne, au fait de devoir porter deux sacs au lieu d'un puisque je ne disposai pas de sac assez volumineux pour l'ensembke de ce raid et que je suis parti avec deux sacs de 40/45 litres au lieu d'un seul...
Arrivés sur la partie plate du sentier en RD de la Cavichja, nous avons beau écarquiller les yeux en scrutant la pente en amont du chemin pour trouver le départ de la trace de Manghja e Beie qui devrait se trouver par là (encore une info d'Achille !), impossible de la découvrir. Mauvais signe pour notre troisième jour... Nous arrivons sans trop de problème au deuxième gué où nous faisons une courte pause.

La partie suivante du sentier s'avère rébarbative au possible. Olivier, pour cause d'hypoglycémie, est au plus mal dans la montée et je ne suis guère mieux sous une forte chaleur à basse altitude. Nous profitons de quelques pauses pour examiner la montée à Manghja e Beie avant d'y aller après-demain et pour observer de plus près le ravin de la Solitude en fond de vallée. L'arrivée au ruisseau avant celui du Saltare (vers 15h30) est un réconfort pour Olivier qui peut s'y rafraîchir et compléter nourriture et boisson... avant que l'on procède à une reconfiguration des sacs pour laisser sous le sentier de montée à la bergerie de Saltare ce qui ne nous est pas nécessaire pour la journée suivante au bout de la Cavichja. Difficile de ne rien oublier dans ce genre d'opération, mais il s'avérera que nous nous y sommes bien pris...

Et maintenant, c'est l'instant que j'attends depuis longtemps, à savoir la découverte du sentier en rive gauche de la Cavichja qui permet de remonter le ravin sans être dans le lit du ruisseau. En une dizaine de passages dans ces parages au cours des trente dernières années, je n'ai jamais réussi à le trouver. Mais, cette fois-ci, nantis d'informations plus précises en provenance d'Achille, nous espérons bien pouvoir l'utiliser pour aller bivouaquer aux environs de Piscia Vitalba, la cascade au pied du ravin de la Solitude. La marche à suivre est simple : prendre le début du sentier montant à la bergerie de Saltare après avoir traversé la vasque du premier ruisseau parallèle à celui de Saltare, prendre une vague trace à gauche en descente (avant le premier virage à droite de la montée) et la suivre pendant une cinquantaine de mètres plein Est en ligne de niveau jusqu'au ruisseau du Saltare : l'amorce du sentier, ou plutôt de la trace cairnée, est exactement en face, bien visible, sur l'autre rive du ruisseau du Saltare. Toutes mes recherches précédentes s'étaient avérées vaines parce que, au lieu d'aller vers l'Est, j'étais descendu trop directement vers la Cavichja en prenant plutôt plein Nord et en traversant le Saltare trop bas...
Contrairement à nos craintes, cette trace est plutôt bien cairnée, avec en outre quelques marques d'écorces ("flashies") sur arbres, et nous progressons assez rapidement au début, seulement gênés par le poids des sacs. Le parcours se fait dans un environnement très végétal, dans un sous-bois assez dense en RG du ruisseau, à 50/60m de l'eau, parfois en hauteur, parfois au même niveau. Bien entendu, ce genre de trace pose quand même ponctuellement quelques interrogations et nous nous trouvons de temps en temps bien embarrassés pour trouver la suite, mais nous nous en tirons assez rapidement à chaque fois. Autre problème : certains passages sont encombrés de ronces récentes et d'autres entravés par des chutes de troncs. Je suis bien aise qu'Olivier ait insisté pour emporter un "pinatu" et le sécateur qui nous évitent pas mal de temps et d'éraflures...

Après un long moment, au sommet d'une raide montée au-dessus du ruisseau, nous atteignons l'un des jalons indiqués par Achille, une bergerie et des enclos alentours encore en assez bon état, dans un coin assez improbable pour y emmener des troupeaux... cela vaut les bergeries de Scaffone, mais en sous-bois et bien plus végétal !

La suite de la trace est plutôt pittoresque avec une montée 50m au-dessus du ruisseau, le long d'une falaise encombrée de touffes de lys orangés, jusqu'à atteindre une vire aérienne sympathique (nous sommes devenus les spécialistes des vires du Filosorma) amenant à un virage à droite sous un bloc rocheux. Un beau passage que l'on n'oublie pas de sitôt et qu'Achille nous avait signalé comme le raccourci le plus pratique de ce site et qui, s'il n'est pas trouvé, oblige à passer par le haut de la falaise.

La suite nous ramène en descente à la Cavichja dont nous traversons le lit pour passer en RD, guidés par une série de cairns bien placés. La trace se fait un peu plus compliquée sur cette rive et nous effectuons une série de montagnes russes qui nous font approcher d'un énorme bloc rocheux, déjà entrevu avant la vire sur l'autre rive, en bas duquel s'ouvre une grotte-bergerie, elle aussi indiquée par Achille, qui constituera un excellent point de bivouac : surplomb rocheux intégral à l'abri de la pluie, point d'eau dans le ruisseau lui-même (80m plus loin), bois et herbes à proximité pour le feu...
Il est alors 18h30, nous avons mis assez nettement moins de 2 heures pour parvenir ici depuis les ruisseaux de Saltare. En consultant mes anciens passages par le lit de la Cavichja, je constaterai plus tard que je n'avais jamais réussi à mettre moins de 2 heures, malgré sac plus léger et meilleure forme : autant dire que cette trace cairnée est de loin la meilleure solution, même à l'étiage du ruisseau, pour remonter la vallée...

Fin de soirée tranquille autour du feu en se disant que cette première journée avait été idéale pour nous avec une réussite complète de tout ce que nous envisagions de réaliser : transport dans les temps pour nous deux, barrière ouverte à Monte Estremu, découverte sans problème du sentier de la Cavichja, remontée de la vallée dans des délais optima et sans difficulté notable, météo idéale après un mois de juin exécrable qui nous avait fait craindre le pire pour notre projet de raid, ...

Statistiques de la journée : 3.900m en 3h00 pour 800m de D+ et 100m de D-.

Rappel ci-contre à gauche de cette page de la carte de la partie de la vallée de la Cavichja avec le tracé du parcours entre la prise d'eau et la grotte-bergerie en bas de la Combe Rouge vers Piscia Vitalba.

Voir les photos de la première journée de ce raid dans le diaporama-vidéo ci-dessous :

Diaporama "Raid Filosorma - juin 2015 - J1"