Raid Filosorma juin 2015 - J3
Par PhE le mardi 15 septembre 2015, 23:09 - Ravinisme - Lien permanent
Troisième article concernant notre raid de juin dernier : celui-ci décrit l'itinéraire qui nous a emmenés vers le Capu a e Poste sur le versant au Nord de Saltare et de la Cavichja pour aller visiter un site original (visiblement anciennement utilisé comme estive, et encore visité de temps en temps par chasseurs et randonneurs locaux initiés) qui avait été indiqué à Olivier par une connaissance et confirmé par Achille à la Maison Forestière de Piriu...
Encore un des secrets de ce massif que je connaissais absolument pas et dont je n'avais même pas entendu parler malgré mes nombreux passages dans le coin ! A noter que nous en avons profité pour tenter d'escalader le sommet de ce massif, le Capu a e Poste, que nous n'avaons pas réussi faute de ne pas avoir deviné son itinéraire final mais que nous avons remplacé par un sommet tout proche et d'altitude encore plus élevée (1450m ?) même s'il n'est pas indiqué sur la carte IGN... Capu a e Poste bis ?
Rappel du sommaire du récit de ces cinq étapes que vous pouvez ou allez pouvoir lire sur ce blog, sous la forme de quatre articles correspondant à chacune des journées passées sur le terrain, la journée du retour le Jour 5 étant cumulée avec celle de la veille :
- Jour 1 - Mardi 23/06/2015 : Remontée de la Cavichja depuis Monte Estremu et la prise d'eau
- Jour 2 - Mercredi 24/06/2015 : Combe Rouge (Ghjarghje Rosse) et Ravin de la Solitude
- Jour 3 - Jeudi 25/06/2015 : Manghja e Beie et Capu a Poste bis
- Jours 4 et 5 - Vendredi 26/06/2015 et Samedi 27/06/2015 : Bocca di Serra Pianella, Pointe Lejosne, Monte Saltare et retour à Monte Estremu
Pour suivre plus facilement les détails de l'article, vous trouverez à gauche de cette page la carte de la partie de la vallée de la Cavichja avec le tracé du parcours depuis la bergerie de Saltare jusqu'à Manghja e Beie, puis le Capu a e Poste bis.
P.S. : compte tenu de la perte de mon appareil photo lors de la descente de Bocca di Serra Pianella, toutes les images des articles de ce raid sont des photos prises par Olivier que je lui ai empruntées !
Manghja e Beie et Capu a e Poste bis
De plus en plus tôt le démarrage de ce matin du Vendredi 25 juin avec un lever vers 5h30 dans notre grotte annexe de Saltare et un départ vers 6h30/6h40 pour notre périple de la journée...
J'étais tout de même un peu inquiet à l'idée de ne pas trouver la trace de montée ! Nous ne l'avions pas vu au passage à la montée, sur le replat du sentier le long de la rive droite de la Cavichja entre les deux gués, et je me demandais si elle existait bien. Nous redescendons le sentier de montée depuis la bergerie de Saltare, traversons le gué de la Cavichja et parcourons le sentier jusqu'au replat avant qu'il ne redescende vers le gué sous la prise d'eau, avec au passage quelques belle vues sur l'aval de la vallée où nous entrevoyons le versant Scaffone avec le Pinzu Scaffone et, plus loin, Valle Serrata. Nous y sommes vers 7h40 et commençons à chercher le départ du sentier de Manghja e Beie...
Et bien, la trace existe toujours et je la trouve assez facilement, mais heureusement qu'Achille nous avait donné des détails très précis sinon nous serions facilement passés sans la voir. Ses instructions étaient "Dans les 50 premiers mètres du long replat, tu dois voir un chêne-vert troué avec une pierre dans le trou (si elle y est encore). c'est le début du sentier qui te mène à la bergerie de Manghja e beie". A part qu'il n'y a plus de pierre dans le trou du chêne, c'est exactement cela ! Mais le "sentier" n'est en fait qu'une misérable trace non cairnée, simplement marquée par une trouée sous une végétation de sous-bois d'arbousiers et de chênes-verts. Difficile de croire, comme Victor nous l'avait écrit par mail, qu'un accompagnateur puisse emmener un groupe de clients payants là-dedans...
La montée dans ce sous-bois sombre n'est pas de tout repos ! La pente est très raide, terreuse, avec de nombreux obstacles de troncs et branches en travers et la trace ne comporte aucun cairn : seule la trace au sol et la trouée plus large dans la végétation aide à la suivre. Du coup, les fausses pistes sont nombreuses et nous devons faire face à de nombreuses sorties de routes que nous récupérons au fur et à mesure de la montée. C'est une partie plutôt fastidieuse puisque, outre la difficulté physique de la pente, il n'y a aucun moyen de voir le paysage sous cette végétation qui nous entoure hermétiquement... Tellement fastidieuse et monotone d'ailleurs qu'Olivier n'a pris aucune photo dans cette zone !
Ce n'est qu'au bout de 200m de dénivelé et de montée dans ce tunnel que nous commençons par moments à apercevoir le paysage derrière nous, la face Nord du Pinzu Scaffone, par des trouées de végétation. Devant nous, un couloir d'éboulis nous sort de la forêt et fait infléchir notre parcours vers l'Est. La Paglia Orba et la grande Barrière apparaissent sur notre droite avant même que nous arrivions au sommet de cette pente d'éboulis, aussi casse-pattes et aussi irritante que la pente terreuse encombrée qui l'avait précédée, le paysage en plus... Derrière nous, à droite de la Paglia Orba, tout le versant Scaffone et Valle Serrata s'offrent désormais à nos yeux...
Devant, nous parvenons en vue du pin remarquable qui marque la fin des éboulis et l'accès au dernier couloir de montée vers notre objectif : ce pin nous avait été indiqué par Achille comme jalon de ce parcours et nous confirme être sur la bonne voie.
Nous commençons à rencontrer quelques cairns depuis la sortie de la forêt et la pente d'éboulis : ils nous auraient mieux servi dans la zone forestière... Sur notre droite, un petit piton rocheux nous surplombe qu'Olivier me propose d'aller visiter. Nous obliquons donc vers la droite pour escalader ce piton rocheux (vue sympa !), avant de le traverser pour rejoindre la pente sous le pin remarquable marquant la suite de l'itinéraire.
La montée ultérieure est un peu aléatoire tant il y a de possibilités de passages dans cette pente compliquée, entrecoupée de petits ressauts rocheux obligeant à chercher le meilleur franchissement et présentant plusieurs possibilités de cheminements que les rares cairns du parcours n'aident pas à identifier.
Enfin la pente s'infléchit et nous arrivons sur cette espèce de grande vire à 1190m d'altitude qui borde la longue falaise marquant ce site remarquable. Il est à peine 10h00 et en approchant de la paroi, nous tombons tout de suite sur des murs de bergerie indiquant bien que ce site était une zone d'estive jusqu'à une époque récente. Plus loin vers la droite, nous découvrons la grotte principale qui donne sans doute son nom à ce coin : vaste plate-forme d'une cinquantaine de m² abritée par un toit horizontal de roche qui dégouline de gouttes d'eau de toute part ("Beie") et parsemée d'ustensiles de cuisine et de sachets de nourriture ("Manghja") indiquant qu'elle est toujours utilisée, au moins pour les repas... Des gobelets en plastique permettent de récupérer l'eau chutant du plafond, mais il faut du temps et de la ténacité ! D'autres grottes, moins spacieuses mais elles aussi protégées de murets complètent ce site qui a dû être beaucoup utilisé et par pas mal de monde à une certaine époque (?).
C'est une vire panoramique qui se trouve devant la grotte et permet de découvrir tous les paysages les plus spectaculaires du Filosorma dans des conditions presque aussi bonnes qu'au sommet du Monte Saltare, même si ce n'est pas à 360° ! La Grande Barrière et ses ravins, le Saltare, la Paglia Orba (manque le col des Maures caché !) et tout le versant Scaffone en face de nous avec le parcours de la vire de l'Andadonna qu'on aperçoit démarrant du couloir de Bocca Laggera...
Après une pause visite - photos, nous décidons vers 10h30 de grimper au sommet du Capu a e Poste qui se trouve seulement 300m plus haut. La voie de montée n'est pas très évidente pour nous : difficile de savoir par où contourner la raide arête Sud au-dessus de nous qui, elle, comporte trop de difficultés. Finalement, nous nous décidons pour la gauche (Ouest) et commençons à longer notre falaise au départ des grottes en découvrant au passage d'autres ruines de bergeries. Au bout de 400m de traversée environ, nous pouvons entamer la montée, d'abord en traversant un rideau de végétation puis en empruntant un des couloirs rocheux qui montent vers le nord dans cette face Sud-Ouest de ce que nous pensons être le Capu a e Poste. Après 150m de dénivelé, en consultant le GPS, Olivier s'aperçoit que le sommet est encore bien loin et qu'il nous faut encore parcourir pas mal de chemin vers le Nord. Ce que nous faisons en longeant une paroi rocheuse sous l'arête Sud au-dessus de nous. En nous rapprochant d'un grand ravin sur notre gauche qui semble partir à proximité du sommet, nous essayons de rejoindre l'arête et nous y arrivons enfin en contournant la base de la paroi. Là, surprise, au bout de cette arête vers le Nord, nous arrivons à une sorte de rambarde rocheuse surplombant de plusieurs dizaines de mètres une profonde entaille qui n'est autre que le départ de notre ravin sur notre gauche. La crête sur laquelle nous nous trouvons est séparée du Capu a e Poste par cette profonde entaille marquant un col et il n'est guère possible d'y descendre vu la verticalité de la paroi sous nos pieds. Bref, pour aller au sommet du Capu a e Poste, il nous aurait fallu prendre plus bas à gauche en traversant ce ravin entrevu à un niveau où il n'y avait pas de difficulté technique...
Le plus bizarre dans cette situation, c'est que nous avons l'impression d'être au minimum au même niveau que le sommet en face de nous, le Capu a e Poste, alors que le sommet de l'arête où nous nous trouvons est au moins 30 à 40m plus haut. Le Capu a e Poste n'est donc pas le plus haut sommet de cette zone et nous décidons, faute de l'avoir atteint, de monter au sommet de ce "Capu a e Poste bis" qui est derrière nous. Il nous faut franchir quelques pas d'escalade pour rejoindre le fil de l'arête qui descend de ce sommet. Nous y sommes à 11h20 et découvrons un très beau sommet panoramique, cette fois-ci sur 360°...
Une plate-forme rocheuse au SW (1146m sur la carte IGN) nous interpelle par sa forme et la plate-forme à son sommet... Ce n'est pas aujourd'hui que nous pourrons aller la visiter !
La descente est facilitée par notre connaissance du parcours mémorisé durant la montée et nous sommes de retour à Manghja e Beie peu après midi. Longue pause déjeuner - photos - visite jusqu'à 13h30, heure à laquelle nous reprenons le chemin du retour. Les éboulis ne sont pas plus confortables à la descente qu'à la montée. Quant à la descente de la "trace non cairnée" dans les sous-bois, elle nous réserve encore plusieurs sorties de piste dont l'une nous fait descendre un long moment hors trace, dans un maquis permettant quand même une certaine progression, avant de la retrouver en consultant le GPS d'Olivier. Nous sommes au replat du sentier de la Cavichja entre les deux gués à 15h et rejoignons la bergerie de Saltare à 16h.
Ouf ! L'abominable énergumène de la veille et sa concubine ont quitté la grotte et sont redescendus... Nous pouvons déménager nos affaires depuis l'autre grotte et nous réinstaller pour le restant de notre séjour dans la bergerie.
Statistiques de la journée : 8.420m en 7h30 pour 1500m de D+ et D-. Pas si mal !
Rappel ci-contre à gauche de cette page de la carte de la partie de la vallée de la Cavichja avec le tracé du parcours depuis la bergerie de Saltare jusqu'à Manghja e Beie, puis le Capu a e Poste bis.
Voir les photos de la troisième journée de ce raid dans le diaporama-vidéo ci-dessous :
Diaporama "Raid Filosorma - juin 2015 - J3"
Raid Filosorma - juin 2015
Jour 3
Commentaires
@Olivier :
Bravo pour votre persévérance !
C'est là qu'on se rend compte de la ténacité qu'il faut mettre en œuvre pour réaliser certains itinéraires en Corse...
A lire votre compte-rendu, j'ai l'impression que la trace n'a pas beaucoup changé depuis notre passage en 2015, ce qui montre que le maquis reste à un niveau constant dans le coin (contrairement à certaines régions où il pousse de manière insensée).
Concernant la descente, pour nous aussi il y a eu sorties de route en dehors de la trace de montée (deux fois), mais on s'en sort toujours en continuant à descendre droit pour retrouver les trouées plus bas. Ce versant est recouvert d'un maquis qui n'est jamais inextricable : on peut donc toujours avancer, même si on va beaucoup moins vite bien sûr en dehors de la trace principale...
3h de temps de montée suppose tout de même une bonne forme physique ! ;-°
Nouvelle tentative pour Manghja e beie, réussie cette fois, aujourd'hui le 09/09.
La pierre est toujours coincée dans sont tronc au départ de la trace qui quitte le chemin du Saltare.
Pas trop de cairns dans la montée dans la forêt, mais la trouée de montée se devine plus ou moins et quand on sait à peu près où chercher, ça aide. ça n'empêche pas que j'ai perdu la trace à la descente !
L'arbre remarquable est toujours à sa place ! A partir de là, il faut effectivement continuer à monter, d'abord un peu à droite de l'arête, par un cheminement mi-rocheux-mi-maquis assez raide, mais qui se devine bien si l'on prend soin de chercher à passer "au plus facile. Quelques cairns m'ont permis de m'assurer que j'étais bien sur le chemin de quelque chose.
Le site des bergeries est somptueux : en promontoire au dessus de la vallée de la Cavicchia, face aux ravins du Saltare et de Laoscella. Franchement, ça vaut le Saltare et quand on ne se perd pas, la progression est finalement ludique (très variée, au moins), et finalement pas très longue (malgré la piste depuis Bargiana) : 3h.
En septembre, les cavités des bergeries sont sèches.
Voilà toutes les infos que je peux donner.
Oups ! une fausse manœuvre m'a fait envoyer le même message 2 fois... Vous pouvez supprimer le second !
Oui, j'ai bien l'intention de retourner dans le coin pour arriver jusqu'à Manghja e Beie. Ce versant est superbe, lui aussi, et offre une vue imprenable sur Saltare et Laoscella.
Bonjour @Olivier : ,
Merci de votre retour sur cet itinéraire, quasi-inconnu sauf de quelques locaux ou initiés, et des informations actualisées que vous en donnez !
Dommage que vous n'ayez pu aller jusqu'au bout : le site est vraiment original et intéressant...
Ce n'est que partie remise ! :-)
Bonjour,
J'ai enfin tenté de monter à Manghja e Beie cette fin août et ramène quelques info fraîche :
le chêne avec la pierre coincée qui indique le départ du chemin est toujours là (j'ai une photo). Il se situe sur le chemin du Saltare, quand celui-ci redevient plat, immédiatement après la raide première montée au dessus du barrage.
Cette fin août, la montée dans la forêt était plutôt bien visible, avec quelques cairns. J'en ai ajouté pas mal (mais la durée de vie d'un cairn...). Grosso modo, la trace monte plus ou moins en lacets droit dans la pente, avant de tirer progressivement sur le droite jusqu'à buter sur une falaise rocheuse, qui marque la limite de la forêt.
La trace, nettement moins cairnée, mais encore visible, suit la base de cette falaise sur la droite pour aboutir rapidement dans un vallon raide surmonté par le "pin remarquable". Ça passe mieux en RG (sur le droite donc) qu'en restant dans les éboulis du fond. On gagne ainsi un collet, puis le pin remarquable. Plus de cairn ni trace.
A partir de là, si j'avais mieux lu, je n'aurais pas traversé toujours vers la droite, d'abord sur des vires tentantes, en direction d'un beau bosquet de larici, mais je serais monté droit au-dessus du pin, en longeant plus ou moins une arête.
Bref, il faudra que j'y retourne.