Le couloir des Chasseurs (U Curridore di I Cacciatori)

En montant dans le Couloir des Chasseurs : la montée au-dessus du ressautAu cours de mes premières années en Corse, je cherchais des informations sur les parcours de randonnée/escalade en Corse (il n’y a eu que le Guide des Montagnes corses de Fabrikant et les 100 plus belles courses de Corse de Quilici/Agresti jusqu’à la fin des années 80 !) et j’achetais tous les livres qui sortaient sur ce sujet. A part quelques brochures de Quilici sur Bavella (mais avec quelques perles dont je me suis bien servi dans cette région…), rien à se mettre sous la dent jusqu’à la sortie en 1991 d’un petit livre broché intitulé Corsica Wilderness de Francis Thibaudeau : un bijou que ce bouquin, Corse sauvage sur papier, avec son auteur, le dénommé Thibaudeau, un Pyrénéen tombé par hasard en Corse et devenu amoureux de ce pays jusqu’à être dénommé « Andaccianu » (Vagabond) par les indigènes dans les années 80 ! Emoticones

Corsica Wilderness de Francis Thibaudeau, version 1991A ce sujet, regardez la page de garde de son topo et vous verrez que je n’ai rien inventé puisqu’il avait déjà mis en pratique les rubriques Randonnée, Escalade et Canyons que je n’ai fait que reprendre sur Internet 15 ans plus tard ! Emoticones Son topo-guide correspondait exactement aux différents types d’aventures que je recherchais à l’époque avec le désir de trouver suffisamment de renseignements pour ne pas perdre de temps pendant mes vacances à faire de l’exploration… Membre du GPHM, alpiniste, poète, ex-gardien du refuge de Paliri, Francis, plus qu’un explorateur des montagnes corses comme Fabrikant, a plutôt été un aventurier de ces activités montagnardes variées qu’on peut pratiquer en Corse : pas encore retiré des activités et fervent adepte du corsisme, il a encore présidé à l’élaboration des derniers topos sur Bavella avec Quilici, Rocca e Sole et Acqua e Petra. Emoticones

Dégustez ci-dessous quelques extraits de sa poésie :
"Il existe une terre où l'ennui est banni, au parfum d'aventure, à l'odeur du maquis, ici vous escaladez le ciel de montagnes ensoleillés, vous grimpez des falaises au rocher magiques..."
"Vous nagerez dans des canyons ludiques...A deux brasses du continent, la Corse et ses multiples joyaux vous tend une main fraternelle."
Emoticones

Corsica Wilderness donne des topos originaux d’un ensemble de parcours d’escalade divers et d’itinéraires de randonnées haut de gamme qui n’étaient pas encore qualifiés de « ravinistes » ! Une superbe variété dans tous les genres et, enfin, pas seulement sur Bavella, mais sur l’ensemble de l’île…
Parmi tous ces parcours, j’avais noté (en 1991 !) un petit ravin près du col de Bavella que Francis dénommait le Couloir des Chasseurs ou en langue chantante corse, U Curridore di I Cacciatori, mais je l’avais mis de côté comme objectif négligeable compte tenu de son absence d’ampleur. Ce n’est donc qu’en 2005 que, par épuisement de mes topos, je condescendis enfin à l’essayer un matin de juillet 2005 (vers midi pour moi…), pour occuper une petite demi-journée de beau temps. Emoticones

Topo Thibaudeau 1991 du Couloir des ChasseursInutile de donner une description précise de cet itinéraire très bien détaillé dans la page du topo de Francis ci-contre !
Je me contenterai de vous résumer mon propre parcours en quelques mots : Emoticones

  • Pour les horaires : parti à 12 h 05, j’étais en bas du couloir à 12 h 30, en haut à 13 h et à la Croix de Leccia à 13 h 05. Retour au col en une demi-heure sans être passé par Punta Bigornu et en déjeunant une bonne heure à la Croix…
  • Pour les difficultés : pas de problème pour trouver le bon sentier à partir du col (vers u Pilastru di Alba), puis la recherche de l’entrée du couloir prend 3 minutes et le couloir lui-même n’oppose que le ressaut en 3 (un pas !)
  • Pour l’ambiance : magnifique et très ravin, avec un couloir très étroit, sombre et austère, juste ce qu’il faut de difficultés pour l’apprécier sans paniquer, à peu de distance du col et pourtant avec une sensation de solitude et d’isolement incroyables !

Quelques photos d’illustration ci-dessous durant l’approche et dans le couloir :

Dans l'approche du Couloir des Chasseurs depuis le col de Bavella : col de Bavedda et arête de Paliri entre Aracale et Velacu Dans l'approche du Couloir des Chasseurs depuis le col : les ravins au Nord de Bavedda et le ravin de Trovone

Dans le bas du Couloir des Chasseurs : l'étroiture Au milieu du Couloir des Chasseurs : le ressaut à escalader en 3/3+

Vue générale dans le Couloir des Chasseurs

La sortie du couloir et la Croix de Leccia :

Arrivée du Couloir des Chasseurs à la Croix de Leccia : fin du couloir Arrivée du Couloir des Chasseurs à la Croix de Leccia : la croix au sommet du promontoire

En conclusion, une course à recommander à ceux qui veulent s’initier sans stress à la remontée de ravins raides avec l’ambiance ad hoc, mais sans l’engagement et l’exposition des courses isolées, et avec une belle ambiance garantie « narrows » (dixit nos amis américains) et à l’ombre ! Emoticones La carte du coin et le parcours tel que je l’ai réalisé vous sont donnés sur la photo ci-contre, mais le croquis de Francis Thibaudeau dans son topo est beaucoup plus explicite… Côté orientation, difficile de se tromper dans un couloir de quelques mètres de large, encore qu'il y ait des branches secondaires affluentes (Cf. croquis Thibaudeau).
Essayez donc le parcours complet avec la traversée du massif et la montée au sommet de Punta Bigorna qu'il recommande et la demi-journée sera déjà plus remplie !

A noter cette bizarrerie : dans l’édition suivante de Corsica Wilderness en 1993, cette page décrivant le Couloir des Chasseurs n’a pas été reprise et a purement et simplement disparu ! Ne perdez pas votre temps à la chercher dans cette dernière édition, elle n’existe que dans la version 1991. Emoticones

Carte des environs du col de Bavella avec Punta Bigornu et l'école d'escaladeVoir la carte de ce parcours ci-contre et la fiche de l’itinéraire sur le site Web en Ravinisme - ravins de Bavedda et l'ensemble des photos sur flickr.

Course conseillée pour débuter en course courte de ravin étroit peu exposé !

Le Haut vallon de Coracchia

Ravin de Coracchia depuis Bocca CastellucciuComment en suis-je venu à imaginer un itinéraire allant visiter ce haut vallon de Coracchia qui n’est inscrit dans aucun guide connu sur la Corse ? Cette fois-ci, ce n’est pas à vue que je m’y suis dirigé (ce vallon est plutôt caché), mais sur une idée trouvée dans un des nombreux ouvrages de Charles (Pujos…) dans lesquels, si vous prenez la peine de lire entre les lignes, on peut trouver un trésor d’objectifs en tous genres sur l’île ! EmoticonesLà, c’est la vue de la photo prise par Charles d’un « laquet » dans le haut de ce vallon qui m’a donné envie d’y aller : comme toujours avec Charles, les informations sont succinctes et, pour ce coup-là, je n’avais que… le nom, Coracchia, point final !
Avec le nom, la carte et quelques recherches, il s’avéra que ce vallon était celui d’un ruisseau affluent du Haut Cruzini et qu’il était effectivement complètement inconnu des topos : les seules informations trouvées dans ce coin étaient encore celles de Michel Fabrikant avec, dans son guide, une description de l’arête NW du Migliarellu (Didier-Richard 1993 – course 202) qui remonte l’arête constituant la RG du vallon de Coracchia. Du pur Fabrikant en F +, très alléchant, mais allant au sommet du Migliarellu que j’avais déjà fait par la Cardiccia au Sud et pas dans le haut vallon et son « laquet »… C’est donc muni de ces seules données que je décidais de remonter ce vallon par le bas en me servant de la description de Fabrikant jusqu’à la traversée du Cruzini ! Emoticones

Le haut vallon de Coracchia sous le Migliarellu

La maison au bout du hameau de ChiusaConnaissant déjà cette longue vallée du Haut Cruzini et le long sentier pour monter à Bocca d’Oreccia, je partis tôt ce matin du 22 juillet 2006 et arrivait à Chiusa à 9 h : et pour arriver à ce bout du monde à 9 h du matin en partant de la côte Ouest (Sagone), il faut 1°) se lever de bonne heure 2°) avoir une bonne dose d’habileté au volant sur les routes corses ! Emoticones
Ensuite c’est le long circuit de la variante orange du Mare a Mare Nord jusqu’à la grotte de Coracchia atteinte en 1 h 45 : cette fois-ci, j’ai réussi à voir la grotte au passage, alors que quelques années plus tôt, je ne l’avais même pas aperçue !

C’est là que devrait se dessiner l’embranchement vers le ravin de Coracchia… En suivant les indications de Fabrikant (et les indications de la carte IGN mentionnant un sentier descendant vers la Coracchia, affluent du Cruzini), je ne trouvai que de vagues sentes partant à droite dans une jungle infréquentable. L’une de ces traces me mena difficilement jusqu’à une crête 30 m au-dessus du ruisseau, mais la densité de la végétation me poussa à faire demi-tour  : erreur, comme je le constaterai au retour d’une part, et 30 minutes perdues sans pouvoir traverser en RG de la Coracchia comme prévu, d’autre part. Joyeux début ! Emoticones

Arête NW du Migliarellu depuis Bocca Castellucciu Ravin de Coracchia depuis Bocca CastellucciuGrotte de Coracchia… et la végétation du coin

Pour passer à la tentative suivante, je montai plus haut sur le sentier orange jusque vers 1050 m et le quittai pour essayer de suivre la RD de la Coracchia où le maquis assez éclairci et les arbres moins denses semblaient laisser une chance de passage : encore pire, et 45 nouvelles minutes perdues en vain, accompagnées de la perte de sang et de morceaux de vêtements sur le terrain pour cause de longues haies de ronces… Je n’arrive pas à comprendre qu’une végétation aussi claire vue de loin puisse être infranchissable, mais, si on peut la franchir, c’est en y consacrant beaucoup de temps, d’énergie et de peau pour une progression beaucoup trop lente !

Ravin de Coracchia en RD… la végétation semble claire !

Retour au sentier à 12 h : grandiose, je n’étais toujours que vers 1000 m d’altitude ! Je ne vis rien d’autre à essayer que de contourner le bas de ce ravin en continuant à remonter le Mare a Mare. Mais on rentre alors dans la hêtraie au pied de raides pentes, encombrées d’un bel enchevêtrement de végétation, qui m’obligèrent à traverser le ruisseau suivant, après la Coracchia, sans pouvoir le suivre, puis à continuer jusqu’en vue des bergeries de Terricione. Là, un deuxième ruisseau dessinait un ravin plus petit mais débarrassé de la jungle qui me permit de remonter rapidement jusqu’aux abords de sa source vers 1360 m.

Bergeries de Terriccione depuis le petit ravin Haute vallée du Cruzini depuis le petit ravin

A l’estime (et la carte), j’entrepris alors une traversée ascendante vers la droite, retrouvai le gros ruisseau précédent, le franchissai et escaladai la raide pente de sa RG jusqu’à une arête remarquable, hérissée de statues rocheuses étonnantes et atteinte vers 13 h 30. Surprise ! Cette arête abrite une série étagée de ruines de bergeries, d’ailleurs indiquées sur la carte IGN mais sans nom, et sises vers 1550/1600 m. Elles ont été construites sur une crête rocheuse remarquable surplombant verticalement le ravin de Coracchia que l’on découvre 150 à 200 m plus bas… Superbe !

Arête des statues de Coracchia Ravin vertical à gauche des bergeries donnant sur le vallon de CoracchiaBergeries surplombant Coracchia à 1600 m : 1ère bergerie… vertigineuse

Pas question de descendre directement dans le ravin, sauf en rappel… Je continuai donc à remonter la crête en découvrant au fur et à mesure de la montée le fond du ravin de Coracchia derrière de belles aiguilles rocheuses. Vers 13 h 50, je vis distinctement tout le fond du vallon constitué en un replat circulaire, au-dessus des barres rocheuses du ravin, enserré entre les arêtes et versant du Migliarellu dont le sommet le domine au fond. La barre rocheuse sous la crête vers Coracchia est devenue praticable (avec quelques vaches y paressant) et me permit de descendre sans encombres une centaine de mètres pour atteindre le replat et visiter sa partie horizontale à 14 h 20.

Haut vallon de Coracchia et crêtes du Migliarelllu La descente vers Coracchia et ses vachesCrête de Coracchia vers 1750 m : haut vallon de Coracchia

Je n’eus que peu de temps à consacrer à la visite du cours supérieur de la Coracchia : la journée avançait et la descente était très longue. Retour donc par le même chemin jusqu’aux bergeries à 15 h 15, avec un déjeuner expédié en un quart d’heure Emoticones. Puis la descente à la grotte de Coracchia de 15 h 30 à 16 h 15. Là, un peu déçu de ne pas avoir pu remonter le vallon du bas, je passai un peu de temps à reprendre l’exploration du matin pour franchir la Coracchia vers l’itinéraire Fabrikant : et je réussis enfin à traverser le ruisseau en reprenant les vagues traces amenant à la crête au-dessus du ruisseau et en me montrant un peu plus tenace ensuite pour descendre la raide pente de terre et aboutir dans le ruisseau. Sur l’autre rive, la végétation était complètement dégagée, avec au moins 500 m de remontée claire en RG de la Coracchia avant de retrouver le maquis, et, plein Nord, la lisière de la forêt menant à l’arête NW du Migliarellu. Un itinéraire à essayer une prochaine fois ! Emoticones
Fin de la descente de 16 h 40 à la grotte avec arrivée à 18 h 15 à Chiusa

En conclusion  Emoticones: un bien bel objectif que ce vallon aérien du Haut Coracchia, inconnu de tous et jamais fréquenté, même si l’itinéraire indiqué ci-dessus est complètement baroque et illogique… C’est un bon exemple des décisions que l’on est amené à prendre et à improviser lorsqu’on chemine hors sentiers et sans aucune information préalable. Je la cite ainsi comme course d’initiation parce qu’elle comporte la longueur (environ 8 à 9 h Aller/Retour) et le dénivelé (plus de 1300 m) des grandes courses de ravin, sans en avoir l’ambiance oppressante (pas de parois effrayantes ni d’étroitures, pas d’ombre) et les difficultés (uniquement marche facile) : ce sont simplement les problèmes d’organisation, d’orientation et de recherche de l’itinéraire, ainsi que l’environnement naturel splendide, qui en constituent l’intérêt.
Mon itinéraire par les « bergeries sans nom », même complètement illogique, permet d’aller visiter ces superbes bergeries du vertige en remontant ce petit ravin à 300/400 m à peine du sentier du GR 20 montant à la Pointe Muratello (je voyais les Géhéristes depuis mon cheminement). On peut donc accéder facilement à la partie supérieure du vallon depuis le refuge de l’Onda en traversant à flanc vers 1700 m depuis le GR 20 pour aboutir directement à la partie franchissable de la crête au-dessus du vallon !

En ce qui concerne une indication sur les horaires « standards » : Emoticones

A la montée :

  • Chiusa - Guarchetta : 1 h 30
  • Guarchetta – Grotte de Coracchia : 45 mn
  • Grotte de Coracchia – Bas du petit ravin (en vue des bergeries de Terricione) : 30 mn
  • Bas du petit ravin – Bergeries sans nom 1600 m : 1 h 30
  • Bergeries sans nom 1600 m – Replat du haut vallon de Coracchia : 45 mn


A la descente :

  • Replat du haut vallon de Coracchia - Grotte de Coracchia : 1 h 15
  • Grotte de Coracchia - Chiusa : 1 h 40

Carte de la haute vallée du Cruzini de Chiusa à Bocca d'OrecciaVoir la carte de ce parcours ci-contre et la fiche de l’itinéraire sur le site Web en Ravinisme – Autres ravins et l'ensemble des photos sur flickr. Il n'empêche que la bonne manière de faire ce ravin est bien de le remonter depuis le bas et, compte tenu de mon exploration du retour, je pense qu'il est jouable de franchir la Coracchia comme je l'ai faite (tendance Fabrikant) puis de remonter le ruisseau en RG avec franchissement ou contournement de barres rocheuses à prévoir : la végétation y semble franchissable, mais méfiance... Emoticones

Course conseillée pour débuter en randonnée d'endurance hors piste à tendance orientation !