Traversée des arêtes S et SE de Punta Buvona
Par PhE le mardi 10 novembre 2015, 00:47 - Ravinisme - Lien permanent
Notre fils, Laurent, était venu passer une semaine en Corse au mois d'août dernier avec sa petite famille. La majeure partie de la semaine avait été occupée à trouver des activités où nous pouvions emmener Gabriel (19 mois) avec nous : plage, accro-branche au Parc Aventure, petites randonnées... De ce fait, Laurent n'avait pas eu l'occasion de réaliser une randonnée sauvage un peu sérieuse, sauf un petit entraînement avec des trailers sur les parcours PR3, PR4 et PR5 de l'association "A Punta Bunifazinca" dans la vallée du Cavu. Il commençait donc à piaffer quelque peu !
Comme j'étais encore marqué par le semi-échec avec Olivier de notre tentative de traversée des arêtes de Punta Buvona de fin mai dernier avec notre erreur de brèche après la conquête du sommet, je lui proposais de revenir dans ce coin et d'essayer de trouver le chemin jusqu'à l'amphithéâtre Punta Buvona - Bunifazinca.
L'idée était de trouver la bonne brèche dans l'arête Sud, d'effectuer la traversée en ligne de niveau entre les deux arêtes et de descendre depuis la grande brèche de l'arête SE dans l'amphithéâtre par la vire en écharpe que l'on aperçoit bien depuis Bocca di Lariciu en face...
Pour suivre plus facilement les détails de l'article, vous trouverez ci-contre, à gauche la carte avec le tracé du parcours depuis la D268 et la trace de la traversée aller-retour sous Punta Buvona.
C'est le samedi 22/08 que nous arrivons à trouver un créneau pour effectuer ce parcours. Arrivée à l'entrée de la piste d'Argazavu à 08h40, à peu près dans le même timing que lors de notre passage précédent, avec Olivier, et reprise du parcours de montée à Bocca di Fumicosa, si souvent parcouru de mon côté : le temps n'est pas mauvais mais affiche un ciel très voilé malgrè des prévisions météo plutôt clémentes... On verra plus tard que, comme souvent en Corse, les prévisions seront battues en brèche et que notre randonnée en sera bien affectée !
Comme la dernière fois, nous enchaînons pistes puis sentier jusqu'à son extrémité à la verticale de Punta Samulaghja et nous montons directement au col Nord de Samulaghja sans passer par Bocca di Fumicosa. Le passage sur le sentier sous les parois de Manzaghja nous réserve une belle surprise avec une petite harde de "muvrelle" (mouflonnes) qui évoluent au-dessus de nous au pied des parois et se laissent photographier.
Nous arrivons au col Nord de Samulaghja à 09h55, après seulement 1h15 de montée et nous voyons déjà les nuages arriver massivement nous faisant craindre de nous retrouver dedans. Après avoir franchi le col, nous basculons en versant Est et descendons en oblique d'une centaine de mètres dans ce versant pour rejoindre directement l'arête Sud de Punta Buvona en bas du couloir qui descend de Bocca Buvona. Dans cette descente, je remarque une plate-forme qui devrait donner une vue précise sur cette arête et je fais un petit détour pour aller voir et prendre une photo. Cette vue confirme notre hypothèse : il y a bien deux brèches (et même trois en comptant une brèche bien plus éloignée sur la droite) et nous avons pris celle de droite la fois précédente alors qu'il semble à peu près sûr que celle de gauche est 1°) plus élevée en altitude et permettant d'atteindre le pied de la face Sud de Punta Buvona, juste en face de la grande ouverture de l'arête suivante, 2°) plus facile à remonter avec un couloir plus large et peu d'obstacles.
Arrivés au pied des parois de l'arête SE vers 1300m d'altitude, nous devons encore descendre pour trouver un point faible permettant d'escalader les ressauts inférieurs pour trouver le départ des couloirs au-dessus. Laurent arrive assez vite à trouver un pas d'escalade lui permettant d'y parvenir, mais, de mon côté, je préfère descendre encore plus bas retrouver le passage escaladé avec Olivier la dernière fois. Il est plus facile cette fois-ci puisque sec. Au-dessus, au lieu de prendre la vire vers la droite que nous avions suivie pour rejoindre le mauvais couloir saus la brèche de droite, je continue dans l'axe de l'escalade précédente en tirant légèrement sur la gauche et retrouve Laurent un peu au-dessus en bas du large couloir de la brèche de gauche.
Malheureusement, la montée de ce couloir s'avère plus compliquée que ce qu'elle m'avait semblée lors de l'examen à distance. Pas mal d'éboulis en équilibre assez dangereux et quelques passages scabreux sur blocs le rendent peu agréable à gravir et nous sommes bien contents d'atteindre sans pépin la brèche ciblée, surplombée par un magnifique pin qui balise sa localisation. Comme subodoré dans notre hypothèse de recherche de cheminement, nous sommes bien exactement au pied de la paroi Sud sous le sommet de Punta Buvona et en face de la large ouverture de l'arête SE suivante...
Il est 10h45, soit 2 heures de montée depuis le départ, et nous entamons la traversée en cherchant l'itinéraire le plus facile pour éviter au maximum les montées - descentes.
Cette traversée n'offre pas de difficultés importantes, même s'il faut sans cesse se poser la question de la suite du cheminement, et nous arrivons à proximité de l'ouverture dans l'arête SE. Elle est en fait découpée par deux brèches décalées en altitude, séparées par un petit piton rocheux. C'est naturellement vers le col de gauche que nous nous dirigeons et l'atteignons après le franchissement en descente - montée du couloir supérieur du ravin formé par le ruisseau qui s'écoule entre les deux arêtes.
De l'autre côté de ce col, une vue magnifique sur les parois Ouest de Punta Bunifazinca et l'amphithéâtre herbeux qui la sépare de Punta Buvona. Cela valait le coup de suivre ce parcours complexe pour arriver à cette plate-forme panoramique !
Il est 11h10 et nous avons mis exactement 2h30 pour arriver à ce point. De là où nous sommes, une vire large et herbeuse, marquée par quelques grands pins laricii, démarre de la brèche que nous avons évitée à droite en venant, un peu plus bas que notre plate-forme : elle descend en écharpe rejoindre l'amphithéâtre confirmant mon idée que cet itinéraire était plus rapide que le ravin de Figa pour parvenir à la gauche de l'amphithéâtre au pied de Punta Buvona : 3h par ce chemin (en estimant à 30mn le temps de descente de la vire arborée) au lieu de 4h pour monter à Bocca di Lariciu ou en bas de la vire en écharpe.
Malheureusement, le temps s'est encore gâtée au point de voir les nuages descendre derrière nous à notre altitude et de craindre l'arrivée de la pluie. Nous faisons une pause pour essayer, depuis la plate-forme panoramique, d'examiner l'amphithéâtre et essayer de découvrir les vestiges de l'épave "légendaire" de l'avion de chasse de la guerre 1939-45 qui s'est écrasé dans ces lieux ! Peine perdue, nous avons beau écarquiller les yeux et prendre des photos au zoom des différentes zones de l'amphithéâtre, nous ne trouvons rien et les photos ne nous montreront rien de concret ultérieurement. Toujours un mystère restant à éclaircir...
Nous décidons de ne pas prendre le risque de descendre dans l'amphithéâtre de peur d'un retour sous la pluie et/ou le brouillard et organisons notre retraite. Dans la traversée en sens inverse, nous sommes rapidement pris dans les nuages et commençons à perdre de la visibilité. De plus, difficile de refaire ce cheminement en ligne de niveau exactement comme à l'aller et nous n'arrivons pas à retrouver la brèche de l'arête Sud ! En fait, arrivé à sa verticale, je n'arrive pas à reconnaître le site (normal, on est 20/30m plus bas) et, surtout, ne vois pas le pin caractéristique (il ne se voit pas d'en-dessous). Au lieu de monter à la brèche, nous continuons à explorer le long de l'arête Sud, retrouvons une autre brèche plus loin et nous apercevons que c'est celle que j'avais traversée trois mois plus tôt. Nous revenons en arrière et, finalement, remontons le petit couloir que nous venons d'éviter 20 minutes plus tôt pour rejoindre enfin le pin salvateur et la brèche dans une brume bien installée. Il est 12h20 et nous avons perdu pas mal de temps entre la pause à l'autre brèche et les errements du retour...
Nous entamons immédiatement la descente du couloir où j'arrive à prendre un peu plus de photos qu'à l'aller et éprouve aussi peu de plaisir qu'à la montée tant il y a de possibilités de se casser la g... J'en profite même pour aller jeter un coup d'oeil à l'autre couloir au passage : il m'apparaît finalement presque plus sympa que celui que nous avons emprunté aujourd'hui !
Le retour au col Nord de Samulaghja nous pose quelques problèmes liés à la visibilité maintenant voisine de zéro. Pour ne pas perdre du temps à chercher le col à l'aveuglette en remontant sur la crête, je préfère jouer avec la boussole au départ, puis avec le GPS, puisque j'avais pris la précaution d'enregistrer la position du col à l'aller. Du coup, nous tombons directement dessus en trouvant même un chemin plus direct qu'à l'aller à travers les escarpements rocheux. Nous y sommes à 13h00 et prenons un court déjeuner dans un brouillard complet qui nous empêche même de distinguer Punta Samulaghja à moins de 80m de nous...
Lorsque nous repartons 35 mn plus tard, la visibilité s'est un peu améliorée et, de toute manière, il n'y a plus vraiment de problème d'itinéraire dans ce secteur qu'en outre je connais bien. Nous en profitons pour passer au pied du départ de l'éperon W de Punta Samulaghja, belle voie d'escalade un peu compliquée par deux aiguilles détachées à son pied qui doivent être souvent shuntées par contournement par les grimpeurs n'aimant pas les traversées de brèches avec rappel.
Le reste de la randonnée n'est qu'une formalité, surtout que la visibilité s'améliore petit à petit et que nous évitons la pluie qui avait pourtant commencé à nous frapper au col... Arrivée au début de la piste d'Argazavu et à la voiture à 15h00.
En conclusion : un parcours qui ne doit pas souvent être parcouru, même si il est indiqué dans les différentes éditions des guides Fabrikant. Il est d'ailleurs largement sous-estimé dans ce guide où il classé F alors que l'itinéraire est compliqué à trouver (franchissement de la crête de Samulaghja et descente sur l'autre versant, couloir et brèche de l'arête Sud, traversée vers l'autre arête) et qu'il n'est techniquement pas simple du tout, en particulier pour l'accès et la montée du couloir de la brèche. Mais c'est un bon moyen (assez court pour la zone proche de Punta Buvona) de rejoindre l'amphithéâtre Punta Buvona - Punta Bunifazinca qui est l'emblème des hautes vallées du Cavu !
Dommage que nous ayons dû faire demi-tour si tôt et que nous ayons perdu toutes chances de trouver notre épave d'avion ce coup-là...
Rappel ci-contre à gauche, de la carte avec le tracé du parcours depuis la D268 et le périple accompli.
Voir les photos dans le diaporama ci-dessous qui illustre bien l'ambiance lugubre après l'arrivée de la brume :
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