Ravins de Carciara et Velacu
Par PhE le samedi 07 janvier 2012, 18:40 - Ravinisme - Lien permanent
Il reste encore beaucoup de coins à explorer dans cette Haute Vallée du Cavu qui me sert de jardin depuis quelques années ! Une petite visite à l'entrée du canyon de Carciara avec mon épouse en novembre 2009 avait attiré ma curiosité et poussé à remonter ce canyon et les ravins en amont... Las, c'est seulement deux années plus tard que j'ai pu poursuivre cette exploration, telle qu'elle va être relatée dans l'article ci-dessous.
Le principal problème de ce parcours, c'est de définir son objectif, tant il est compliqué de jouer avec les différents paramètres des courses possibles :
- Remontée de chaque ravin (Carciara, Frassiccia, Velacu, ruisseaux venant de Paliri) en aller-retour,
- Parcours en traversée Haut Cavu - Bavella avec navette de véhicules,
- Parcours en boucle, sous forme de raid avec bivouac, du style Velacu - Crête des Terrasses - retour par Frassiccia (réalisation Charles Pujos),
- En solo ou en groupe.
En octobre dernier, c'est finalement à une exploration en solo que je me suis résolu et j'ai opté pour aller jusqu'à la confluence Frassiccia - Velacu avant de choisir le ravin suivant à remonter en fonction des difficultés.
C'est donc le Lundi 17 octobre 2011 à 09h35 (heure d'hiver ! Caramba, encore bien tard...) que je me suis retrouvé au départ de cette aventure, en utilisant, comme d'habitude pour les courses dans cette partie du Haut Cavu, le parking de la piste de Mela/Lora comme point de démarrage. Beau temps, habituel avec l'été indien qui caractérise ce début de saison d'automne où l'on n'a pas vu le retour traditionnel de la pluie après la sécheresse estivale. Les ruisseaux sont donc au plus bas, ce qui m'arrange...
La première partie de la course jusqu'à l'entrée de la brèche rocheuse du Carciara m'est déjà connue et je reprends exactement le chemin que nous avions pris à l'époque : sentier de Mela (toujours bien démaquisé), descente dans le Mela à la hauteur d'une grande vasque circulaire (380m - 10h20) peu après le ruisseau de Vega Bianca, remontée du Mela, puis du Carciara jusqu'à l'entrée du canyon (445m - 11h10).
Ensuite, je rentre dans l'inconnu en pénétrant dans cette brèche étroite où, heureusement, je n'ai pas besoin de me mouiller les pieds grâce à l'étiage du ruisseau. La progression dans les blocs rocheux n'est pas très facile, mais cela passe sans acrobatie délicate. Le canyon reste étroit pendant presque 200m. La paroi Sud (RD) de la brèche est vraiment très verticale et spectaculaire avec sa roche aux couleurs ocres et noires : très attractive pour les grimpeurs, mais la marche d'approche est dissuasive !
Puis un élargissement de la brèche laisse apparaître une rive gauche peu inclinée et végétale dans laquelle je trouve tout de suite des vestiges de murets amenant à une sorte de sentier aménagé. La progression en est bien facilitée. On peut ainsi visiter des ruines d'aménagements divers (abris, sentier, murets,...) dont je suis incapable d'expliquer l'utilité et l'histoire... mais c'est assez étonnant !
11h20... Retour dans les blocs rocheux à l'approche de la sortie du canyon. Les deux rives sont assez dissymétriques, avec une RG peu inclinée et terreuse à son pied et une RD toujours dotée d'une paroi verticale colorée.
Suite des curiosités locales : à la sortie du canyon, apparaît un long câble métallique laissant imaginer une remontée en téléphérique de ce canyon ? En suivant ce câble, on découvre une longueur assez étonnante et une longue partie amont enroulée autour d'un arbre (??). Si quelqu'un peut m'expliquer à quoi cela pouvait bien servir ?
Après la fin du canyon, le parcours aborde une magnifique double vasque avec cascade intermédiaire d'où l'on a une vue superbe sur la brèche en aval. Puis, le lit du ruisseau se transforme en cours d'éboulis de roches peu aquatique. Il redevient plus étroit peu après, aborde de nouvelles vasques, puis des cascades avant d'arriver à un nouveau et court rétrécissement rocheux, aisé à franchir.
Dix minutes après, j'arrive enfin à la confluence Frassiccia - Velacu. Il est 12h...
C'est l'heure du choix ! Le départ du ruisseau de Frassiccia apparaît bien encombré de végétation et il est vite obstrué par un seuil rocheux vertical doté d'une belle cascade. Au-dessus, il y a encore une longue partie de ravin rocheux raide et étroit, comme il est d'ailleurs bien indiqué sur la carte IGN. A l'inverse, le ruisseau de Velacu démarre sur une partie assez plate, bien ouverte et sans végétation ni difficulté rocheuse.
La paresse aidant, c'est donc vers ce dernier ruisseau que se porte mon choix pour la suite du parcours !
Une centaine de mètres à peine après avoir enfilé le début de la branche du Velacu, voici à nouveau des restes de câble métallique descendant jusque dans le lit du torrent depuis des rochers de la RG. Je suis à plus de 5km et 3h du point de départ (parking voiture), en plein canyon rocheux inaccessible par un quelconque sentier, après franchissement de deux brèches rocheuses délicates, de nombreuses vasques et cascades... Que vient faire ce câble dans ce trou ? A se demander si le téléphérique imaginé tout à l'heure ne servait pas à remonter les touristes de Porto-Vecchio au Trou de la Bombe d'où part le ruisseau de Velacu ?
Le ravin devient de plus en plus étroit et de moins en moins aquatique. Après avoir passé une nouvelle vasque-cascade, j'arrive à la confluence suivante, Velacu à gauche et ruisseau sans nom vers Paliri à droite. L'endroit n'est pas particulièrement joli, car commençant à être encombré de végétation, branches, troncs, etc, sur les deux branches. Il est 12h20...
La branche de gauche du Velacu mérite effectivement son nom de ruisseau ! Il n'y a quasiment plus d'eau (à cette époque !) et le cours, bien que peu incliné et comportant peu d'obstacles rocheux, est difficile à parcourir du fait que les dernières tempêtes d'hiver ont laissé des traces ici, comme partout en Corse cette année. S'ajoutant aux obstacles végétaux, de gros blocs viennent ensuite me gêner à un point tel que je préfère quitter le ruisseau par la RG pour monter un peu et contourner difficilement toute cette végétation. Ensuite, une traversée en ligne de niveau, d'où je peux contempler un instant Punta Cumpuleddu (ou le Promontoire ?) et Calanca Murata au-dessus de moi, me ramène au torrent que je traverse pour remonter sur la RD avant d'arriver à un virage à droite du ruisseau où je décide de m'arrêter. Il est 13h45 et j'ai atteint un point d'où je vois le départ raide du ravin remontant vers le Tafonu di u Cumpuleddu (Trou de la Bombe), situé à moins de 100m.
Le demi-tour est imposé par le fait qu'il est trop tard pour tenter de remonter le ravin, sachant que je dois redescendre. Je suis à 700m d'altitude, avec plus de 600m de ravin raide à remonter et des obstacles que j'ignore, même si le parcours de Charles laisse penser que cela passe. Mais quand cela passe pour lui, cela ne veut pas dire pour les autres ou sans difficulté ! De toute manière, je vois bien que cela passe facilement jusqu'au départ du ravin, donc, pas la peine d'y aller voir...
L'autre raison pour m'arrêter ici est que je viens encore de trouver des restes de murets et, sans doute, de vieux sentier ! C'est assez incroyable et je m'attends presque à voir surgir un berger du siècle dernier avec son troupeau, m'avisant qu'il descend de la bergerie dans laquelle il vit un peu plus haut ! Quel est l'historien (ou l'archéologue) local qui pourra nous raconter l'histoire de ces ravins et leur utilisation d'antan ?
J'ai repris le chemin du retour vers 12h55 en revenant exactement sur mes pas de l'aller pour contourner la végétation de l'amont du ravin, puis en essayant de ne pas me casser la g... dans les blocs pour cause de genoux usés et fatigués ! Cela a donné les horaires suivants : confluence Velacu - ruisseau de Paliri 13h05, confluence Velacu - Frassiccia 13h23, sortie du canyon de Carciara 14h30, sortie du Mela 15h30, parking de Mela/Lora 16h30.
Conclusion :
Encore un enchaînement de ravins méritant le détour, simplement déjà par l'ambiance de cette remontée vers les crêtes de Bavella et les paysages magnifiques qu'elle procure : brèches rocheuses spectaculaires, vasques et cascades habituelles des ravins de la région, végétation assez tropicale par endroits, ... Evidemment, il manque la montée au Tafonu pour compléter le tout !
Mais, en plus, il y a toutes ces traces d'une activité ancienne et révolue que je ne parviens pas à m'expliquer ! Je n'ai jamais rien lu sur une quelconque activité dans le Carciara ou le Velacu et je n'imagine pas ce qu'elle pouvait être. Les derniers murets et sentiers sont à près de 4h de marche, 450m de dénivelé et 6km de la civilisation des pistes les plus lointaines du Cavu, ce qui laisse rêveur sur la motivation des gens qui ont construit tout cela. Cela rappelle l'usine à bois du Purcaraccia et ses ouvriers italiens du début du 20ème siècle, mais la mémoire de cette histoire-là a été écrite ! L'examen des cartes du Plan Terrier (Rouleau 33) et du Cadastre Napoléonien (Conca feuilles A1 et A2) ne donne pas beaucoup de pistes sur le sujet : pas de bergeries, grottes, abris ou sentiers indiqués au-delà de la brèche du Carciara (Stretta de la Carcia)... En aval de la brèche, on distingue un sentier en RD du Mela puis du Carciara qui y menait et qui n'existe plus aujourd'hui. Il traversait le ruisseau de Mela un peu en aval du point IGN349 que l'on peut rejoindre actuellement avec l'ex-piste du Mela. Dommage que ce sentier du Carciara (Carcia) n'existe plus !
Comme les ravins précédents du coin, ce parcours est réservé aux habitués de ce genre de loisir qui n'a qu'un lointain rapport avec la randonnée... La difficulté est liée essentiellement à de la marche en blocs avec une multitude d'obstacles rocheux. Mais pas de passage d'escalade dans cette partie qui ne comprend pas la montée finale beaucoup plus raide. Enfin, la durée du parcours empêche de flâner dans ce ravin où l'on n'imagine pas qu'il puisse y avoir quelqu'un quand on le regarde de l'autre côté du "Trou" là-haut ! Il m'a fallu 7h en aller-retour sans pratiquement aucun arrêt, sauf une pause-déjeuner d'environ 20mn que je suis incapable de localiser dans le temps ni dans l'espace... Preuve de mon intense concentration !
Vous pouvez consulter sur la gauche de la page la carte de la partie de la Haute Vallée du Cavu contenant les ravins explorés avec la trace relevée au GPS du parcours décrit ci-dessus.
Enfin, ci-dessous, le diaporama avec les photos de cette exploration d'octobre 2011 :
Commentaires
@François :
Oui, je suis bien d'accord. A nos ages, difficile de faire des parcours aussi long et compliqué en aller-retour ! Moralité, il faut bien se remettre au raid et porter dans le sac de quoi bivouaquer... :-(
Mon Dieu, tes beaux canisses! Caramba, tout est à recommencer!
Etonnant, toutes ces traces d'activités pastorales ou semi-industrielles (câble) dans un tel endroit: n'y a-t-il vraiment aucun élément de l' histoire de la commune ou de la région à Porto-Vecchio?
Dommage, si je comprends bien, que la Frassiccia soit protégée par une sorte de verrou: le reste de la pente semble moins raide que celle du haut Velaco; il faudrait faire cette rando en plusieurs jours, donc prévoir un petit bivouac.
La tempête dernière de la nuit du Jeudi 5 au Vendredi 6 janvier 2012 a fait pas mal de dégâts, y compris en Corse-du-Sud et, donc, chez nous à Sainte-Lucie de PV : jardins dévastés, canisses envolés, nombreuses chutes d'arbres dont une a presque terrassé la voiture de nos voisins, côtes dévastées. Vents de 200km/h au Cap Corse, 150km/h à Figari, 140km/h à Sainte-Lucie et Porto-Vecchio, 200km/h dans les Bouches de Bonifacio...
Quelques images de chez nous :
Quelques éléments complémentaires ci-dessous avec deux extraits de cartes du Plan Terrier (Rouleau 33) et du Cadastre Napoléonien (Conca feuilles A1 et A2) qui recouvrent le Haut Cavu NW :
N'oubliez pas d'agrandir encore les cartes après l'ouverture de la fenêtre Highslide en cliquant sur l'icône
Quelques remarques à l'examen des documents ci-dessus :
Très intéressant tout cela sur les plans Histoire et Toponymes...