Comme toujours en Corse, le deuxième trek de ce début d’été ne ressembla pas au premier : nous fûmes tout de suite plongés dans une ambiance montagneuse qui alla en s’accentuant au cours de ces cinq journées bien remplies.
Les protagonistes : Philippe bien sûr, notre guide permanent de l’été, nos deux jeunes toulonnais Caro et Victor, enfin en vacances, Arnaud-le-chti impatient de renouveler les exploits de l’an dernier, et votre serviteur-teneur de plume, mis en jambes (heureusement !) par le trek Campomoro - Sainte-Lucie. L’itinéraire était le fruit d’une intense collaboration de Caro et Philippe, assortie de quelques réflexions de ma part, du style « C’est trop long, c’est trop fatigant » dont évidemment il ne fut tenu aucun compte : il est dur d’être le doyen d’une équipe pareille !
L’idée de base était de joindre les mythiques Cervellu et Tretorre, qui dominent la vallée du Cruzzini, à la pointe Migliarello, près du Monte d’Oro, et de redescendre sur Bocognano par le légendaire « glacier » de Busso, en ne négligeant pas, pour une fois, d’emprunter un bout du GR 20, là où il est le plus « haute montagne ».
Les manœuvres de ralliement, compte tenu de la dispersion des membres de l’équipe, furent un peu compliquées, mais nous arrivâmes à nous retrouver le samedi soir au gîte d’étape de Pastricciola, où nous étions seuls. Petit malentendu, Victor avait réservé sans le dîner ; devant les mines déconfites de l’équipe, je vais humblement quémander s’il est possible malgré notre imprévoyance d’être nourris ; eh bien, en dépit de l’heure tardive, le gérant nous apporte quatre somptueuses collations que nous avalons en pensant aux menus spartiates des prochaines soirées…

1er jour : Rosazia-Guagno

Sommet du Cervellu : Caro joue à la pin-up devant le TretorreUne combinaison astucieuse de stop et de conduite permet à l’équipe d’être à pied d’œuvre à Rosazia à une heure raisonnable. Je laisse ma Clio sagement rangée sur le bord de la route. Le sentier est bien indiqué au départ, dans l’épingle à cheveux qui suit le village, il monte fort vers la Bocca di u Capizzolu, 400 m plus haut. Caro, qui marche en avant, tombe sur un billet de 20 euros, sans doute sorti d’une poche en même temps qu’un mouchoir, promesse de quelques fraîches Pietra au prochain bistro.

Préparatifs de départ depuis Rusazia Rusazia depuis la montée à Bocca di u Capizzolu

Au col, nous soufflons, puis reprenons vaillamment la montée ; le sentier suit une arête NE, puis 300 m au-dessus parvient à une bergerie en état, précédée d’une source accueillante ; nouvelle halte avant d’attaquer le Cervellu, par un raide dénivelé de plus de 200 m. La vue est superbe de ce belvédère entre mer et montagne, à l’ouest les golfes de Sagone et d’Ajaccio, à l’est les chaînes du Rotondo et du Monte d’Oro, et bien sûr, nous y déballons le pique-nique. Mes lunettes de soleil, traumatisées par cette pluie d’UV, ont péri dans la montée, et je demande à Caro, en chance aujourd’hui, de m’en trouver une paire.

Depuis le sentier après Bocca Di U Capizzolu : la muraille de Chine Le Monte Cervellu et le mur de la crête W

Sommet du Cervellu : la pause déjeuner Le Tretorre depuis le sommet du Cervellu

Sommet du Cervellu : vue sur la Spusata et la crête W du sentier de montée

La suite paraît simple sur le papier : suivre la crête, arriver à la Bocca a e Forche, et y retrouver le sentier de pays balisé. En réalité ce parcours n’est pas si débonnaire que cela, nous nous heurtons à quelques obstacles qu’il faut contourner par la droite, jusqu’à ce que nous retrouvions, au pied du Tretorre, les balises orange tant attendues. Un cheminement un peu compliqué, généralement bien jalonné, nous fait contourner le relief par le sud, et parvenir à la cote 1381, au pied du raide couloir à l’est du sommet. Philippe propose à Caro de gravir le couloir, ce qu’elle accepte évidemment. Nous les attendons, allongés au soleil.

Dans la traversée Cervellu - Tretorre : en cherchant le chemin vers le Tretorre Bocca A E Forche : début du contournement du Tretorre

Dans le contournement du Tretorre : couloirs rocheux du Tretorre Col NE du Tretorre : la fissure mortelle vers le sommet

Col NE du Tretorre : vue du Cervellu

Le sentier, jusqu’à la Bocca d’Occhiu, suit une crête ENE facile et agréable. Passant près d’un rocher, Caro y découvre, posée délicatement dessus... une paire de lunettes de soleil ! Elle me servira - ô combien - jusqu’à la fin du trek. Après le col, la descente sur Guagno est un peu longuette, le plus dur étant la remontée finale au bourg après le franchissement du ruisseau. Le gîte d’étape nominal est fermé, mais le gîte communal, l’ancien presbytère où fleurissent encore quelques images pieuses, nous accueille : ici encore, nous sommes seuls. Comme prévu, Caro nous offre les Pietra.

Dans la descente vers Guagnu : une ancienne bergerie sous les châtaigniers Le Tretorre et le Cervellu depuis Guagnu le soir

Arrivée à Guagnu  : Punta Alle Porta

2ème jour : Guagno-refuge de Petra Piana

Pause-déjeuner aux bergeries de Belle e Buone Pas question évidemment de prendre le plus court, à savoir la remontée de la vallée du Fiume Grosso jusqu’à la bocca de Manganello ! Le jeu consiste à remonter le vallon du ruisseau (et de la bergerie) dénommé Belle e Buone, et de rattraper le GR 20 à la bocca a Soglia.
Nous attaquons les presque 4 km de macadam à 8 heures, quittons la piste pour le bon sentier en direction de la bocca de Manganello, mais bifurquons 2 km plus loin pour emprunter la passerelle cotée 916 sur IGN en direction des bergeries de Belle e Buone.

Sur la piste Guagnu - Spelonche : Punta Alle Porta

Entre Guagnu et Spelonche : le sentier final Passerelle des Spelonche

Le sentier figure bien sur la carte, avec une relative exactitude, il est cairné par endroits, mais visiblement il est ignoré des tour-operators des randonneurs de Corse ; nous le perdons, le shuntons, le retrouvons, le contournons… bref c’est une vraie gageure que d’arriver à ne pas en perdre le fil ; nous arrivons à pique-niquer aux bergeries, puis, tant bien que mal, en évitant aulnes et ronces, à progresser en direction du col, atteint deux bonnes heures plus tard. L’avouerai-je ? Nous étions contents de retrouver les balises blanches et rouges de ce GR tant vilipendé.

Le sentier de Belle e Buone après Spelonche avec le col à franchir à gauche du Monte Facciatu

Bergeries de Belle e Buone : l'intérieur de la bergerie principale Montée à Bocca A Soglia

Montée à Bocca A Soglia : l'arête des Casette Bocca A Soglia et sentier du GR 20

Pour autant, les difficultés ne sont pas terminées. Arnaud, qui manque d’entraînement, traîne un peu la patte ; et entre la Bocca a Soglia et le col de Rinoso, le GR parcourt un énorme éboulis qui nous force à un jeu de montagnes russes épuisant ; quelques névés subsistent de l’hiver et du printemps, et le spectacle des lacs sous le Lombarduccio nous remplit de joie. Nous franchissons le petit dénivelé qui nous reste pour atteindre la Bocca Muzella où nous soufflons en une halte contemplative : nous l’avons bien méritée !

Montée au col de Rinosu : névés et éboulis Col de Rinosu : lacs de Melu et Capitellu

Entre le col de Rinosu et Bocca Muzzella : lacs de Rinosu Entre le col de Rinosu et Bocca Muzzella : traversée de névé en vue du col

La descente sur Petra Piana n’est plus qu’une formalité ; le refuge est plein, et ses abords sont bondés, d’autant que les gardiens, pour augmenter les capacités d’hébergement, installent à demeure des tentes Quechua style « SDF du canal St Martin »… en occupant évidemment les meilleurs emplacements. Nous sommes fourbus, popote et dodo.

Bivouacs à Petra Piana Refuge de Petra Piana

3ème jour : Le lac de Scapuccioli

En descendant d'A Maniccia vers le lac de Scapuccioli Aujourd’hui, « pause » dans notre course folle. Toujours en quête de quelque record, nous décidons, pour ne pas laisser rouiller la mécanique, de visiter le deuxième « lac le plus haut de Corse », le Scapuccioli donc, sis à 2338 m. Nous retournons, sur les pas d’hier, pour la bocca Muzzella, gravissons à vue la Maniccia, et redescendons sur le lac, encore gelé par endroits.

Dans la montée à A Maniccia depuis Bocca Muzzella : l'arête vers A Maniccia Dans la montée à A Maniccia depuis Bocca Muzzella : montée finale

En descendant d'A Maniccia vers le lac de Scapuccioli En descendant d'A Maniccia vers le lac de Scapuccioli

Le lac de Scapuccioli

Caro, qui a encore des fourmis dans les jambes, émet le désir d’aller voir à quoi ressemble le lac de Cavacciole, 300 m en-dessous : devant nos mines, elle comprend qu’elle ira seule. Nous en profitons pour casser la croûte. D’ailleurs, elle n’atteindra pas le lac, trop de neige, trop d’endroits glissants. Le retour au refuge s’effectue sans problème, avec en toile de fond la chaîne qui court de la Punta alle Porta à la Cima San Gavino, trouée par les deux brèches de Capitellu et de Goria , chacun évoquant ses souvenirs de courses dans le coin…

La remontée du lac de Scapuccioli vers A Maniccia Dans la descente d'A Maniccia vers Bocca Muzzella au retour : les lacs

4ème jour : Petra Piana- l’Onda

Entre Petra Piana et l'Onda : arrêt-boisson aux bergeries de Bialgo Le mauvais temps annoncé se lève pendant la nuit, avec un vent qui fait trembler les faibles attaches de nos tentes. Nous comptions gagner l’Onda par la variante des crêtes, mais devant la violence des rafales, Philippe décide, à la grosse déception de Caro, de jouer la prudence, et de suivre le cheminement normal par le vallon de Manganello. Effectivement, dès les bergeries du Gialgo, nous sommes à l’abri de ce méchant vent d’ouest.

Les tentes souffrent sur l'aire de Petra Piana Pause-déjeuner sous les bergeries de Tolla sur les rives du Manganellu

La descente est agréable et pépère, nous pique-niquons au bord du torrent à proximité des bergeries de Tolla. Les abords de la passerelle éponyme sont envahis (on peut y arriver en 4x4…). Nous remontons en douceur les 450 m forestiers du vallon de Grottaccia.

Entre Petra Piana et l'Onda Pause-déjeuner sous les bergeries de Tolla sur les rives du Manganellu

L’aire de bivouac des bergeries de l’Onda est bien pleine, avec le même problème qu’à Petra Piana en ce qui concerne les tentes « à louer ». Elle ressemble à un bel Oflag, enfermée entre 4 murs, pour la mettre à l’abri du multiple bétail qui divague dans le coin. Les sanitaires sont spartiates : en particulier, une seule toilette fonctionne. Je renonce à prendre ma douche, je trouverai bien demain un bout de torrent…Seule consolation : la bergerie sert des Pietra (tièdes).

Arrivée à la bergerie de l'Onda : l'oflag des tentes à la bergerie

Bergerie de l'Onda : les chevaux, eux, sont en liberté ! Bergerie de l'Onda : les chèvres aussi !

5ème jour : Retour à Bocognano direct

Sommet du Migliarellu : la croix, Caro, Victor Après notre périple de 4 jours qui nous a conduits de Rosazia jusqu’au refuge de l’Onda, nous décidons de nous séparer pour la dernière étape et de nous rejoindre au terminus commun qui sera Bocognano. C’est ainsi qu’Arnaud et François prennent la variante du Mare à Mare Nord jusqu’à Pastricciola pour récupérer leur voiture tandis que Philippe, Victor et moi nous lançons à l’attaque du Migliarello par la face Nord pour redescendre jusqu’à Bocognano (soit le parcours n° 194 de Fabrikant, en sens inverse).
Une splendide journée dans une ambiance sauvage dont voici le récit :

Nous quittons, sans regret, l’aire de bivouac de l’Onda pour suivre vers l’Ouest le GR 20 jusqu’à la Punta Muratellu. Nous montons d’un bon rythme, doublant de nombreux géheristes, et parvenons à la Punta Muratellu bien plus rapidement que les 2 h 20 indiquées par le Topo. Nous passons au sud du sommet pour rejoindre un croisement de chemins sous la crête. C’est la première pause de la matinée dont beaucoup de randonneurs marquent également l’arrêt. La majorité d’entre eux poursuivent le GR en direction de Vizzavona, nous voyons sur notre gauche le Monte d’Oro et la variante balisée qui y mène.

Départ de l'Onda vers Migliarellu/Bocognano Départ de l'Onda vers Migliarellu/Bocognano :  sur le début du sentier

Le GR20 entre l'Onda et Bocca Muratellu : Migliarellu en arrière-plan Bocca Muratellu couverte par le téléphone mobile

Nous sommes bien évidemment les seuls à prendre à droite, sous l’arête reliant la Punta Muratello au sommet. Ce dernier est atteint sans aucune difficulté, et je m’étonne presque que ce sommet soit si facile. Si le Monte d’Oro semble fréquenté, on ne peut pas en dire de même pour son voisin. De là haut, nous pouvons admirer le versant sauvage du vallon de Coracchia. Cette face nord est par endroit encore enneigée et j’ai du mal à visualiser le chemin que nous aurions dû prendre si, comme nous l’avions envisagé au départ, nous étions montés par le versant Cruzini (Fabrikant 202).

Sommet du Migliarellu Sommet du Migliarellu : devant le Monte d'Oro

Si la montée est un jeu d’enfant la descente s’avère autrement plus compliquée et une corde a été installée immédiatement sous le sommet. Philippe lui n’en a même pas besoin et il récupère nos sacs à dos pour nous faciliter le franchissement de ce passage aérien. Il nous faut donc descendre en s'aidant de la corde, le vide dans le dos, ce qui me plait moyennement. Ces quelques mètres franchis, nous contournons par la gauche et traversons l’arête ouest, rocheuse et accidentée, pour arriver progressivement en haut du plateau de Piscia. La traversée est alors plus aisée et nous nous arrêtons pour déjeuner 300 mètre plus bas (1700 m environ) une fois la descente du plateau terminée. Peut être y avait-il là des anciennes bergeries car il subsiste un ancien marquage circulaire au sol.

Arrivée au plateau de Piscia

Sur l'arête W du Migliarellu pour rejoindre le plateau de Piscia Descente du plateau de Piscia

Vue de la descente de Piscia depuis le haut du couloir vers Tanella Pause déjeuner au couloir menant à Tanelle

La pause déjeuner terminée, nous plongeons immédiatement dans un raide couloir sur notre gauche. Nous ne progressons pas vite car nous hésitons parfois sur la direction à prendre (il y a des cairns parfois dans des directions opposées) les herbes sont très hautes et nous ne voyons pas bien où nous posons nos pieds. Deux chutes sur les fesses et un bâton de randonnée cassé plus tard, nous arrivons au lieu-dit de Tanelle au pied du glacier de Busso.

Dans le couloir vers Tanella : Face S du Migliarellu avec le glacier de Busso Arrivée à Tannelle : Face S du Migliarellu avec le glacier de Busso

Nous prenons ensuite vers la droite (direction Sud), longeons quelques dalles et arrivons à un replat herbeux où se dressent les bergeries ruinées de Beggiu à 1240 m. Sur notre droite il y a de superbes parois orangées menant vers des ravins sans nom. Futurs terrains d’exploration pour Philippe comme je le lui suggère sans paraître y toucher Nous continuons à descendre jusqu’à la rivière (le ruisseau de Boggio a maintenant rejoint la Cardiccia) que nous franchissons pour se retrouver alors en rive gauche. Là des câbles ont été installés, ils permettent de prendre pied sur le chemin réaménagé conduisant aux bergeries de Matone. Il n’y a donc plus besoin de redescendre dans le lit de la rivière comme cela est indiqué dans certains guides. Victor et moi avions à la Toussaint 2007 rencontré les deux charmants messieurs qui avaient effectué ces aménagements. Mais il semble bien que les gens ne poussent pas plus loin que Matone car le sentier, bien que réouvert, est envahi par endroit par les ronces.
La traversée jusqu’aux bergeries de Matone (830 m) nous semble interminable. Enfin nous y sommes et goûtons à un repos bien mérité et à l’eau fraîche de la source toute proche. Ces bergeries, elles aussi réaménagées, sont superbes et dominées par un énorme pin solitaire surplombant la Cardiccia.

Les vires au-dessus des bergeries de Beggiu

Descente depuis Tanella : vue du ravin secondaire vers Punta Laccione Arrivée aux bergeries de Matone

La fin du parcours sur un chemin bien dégagé n’est plus qu’une formalité. Nous avons hâte d’arriver, les quelques 1600 mètres de dénivelé négatif commencent à se faire sentir. Nous franchissons la Gravona et arrivons, enfin, au hameau de Busso. Philippe part récupérer sa voiture laissée plus haut au village, Victor et moi l’attendons sur place tandis que les adeptes des descentes de canyons reviennent de leur randonnée aquatique. Depuis que nous avions quittés le GR ce matin ce sont les premières personnes que nous rencontrons.

Arrivée à Bocognano : eh oui, on a descendu tout ça !

A Bocognano, nous rejoignent François et Arnaud. Le camping à la ferme dans lequel nous nous étions arrêtés Victor et moi il y a 2 ans n’offre plus d’hébergement, nous nous rabattons sur le gîte d’étape de la gare de Vizzavona où nous attendent une bonne douche et un fort appréciable repas. Le lendemain Philippe redescend chez lui et nous quatre continuons notre périple pour un complément qui nous emmènera en boucle de Bastelica aux lacs de Vitalaca et Bracca.

5ème jour : Retour à Bocognano via Pastricciola

Sur le sentier du Mare a Mare vers Chiusa : vue vers Cervellu - Tretorre J’ai décidé de rentrer à Pastricciola par le Mare a Mare avec Arnaud : il est manifestement fatigué, ses pieds lui font mal, et de mon côté, je crains de retarder les trois « jeunes » dans leur retour sauvage par le glacier de Busso. Caro vient de décrire ci-dessus cette équipée sportive et instructive.
Le matin, toutes les toilettes sont hors d’usage : j’en fais la remarque en passant près du gardien, qui accuse bien sûr le Parc de négligence dans l’entretien des installations collectives. Quoi qu’il en soit, cette étape de l’Onda ne nous laissera pas un bon souvenir.

Refuge et bergerie de l'Onda

Nous entamons la descente, Arnaud et moi ; au bout d’une demi-heure, la traversée d’un petit torrent nous permet effectivement quelques ablutions. Le sentier est très dégradé par le passage de nombreuses vaches qui trouvent à leur goût cet axe de pénétration vers les pâturages de montagne. Je ne cesse de pester contre cette habitude corse de laisser tous ces lourds bovidés en complète liberté : il paraît que c’est l’Europe qui paye les étiquettes dans les oreilles… Le chemin est bien jalonné d’orange, le seul endroit où on le perd facilement se situe avant la montée à la petite crête qui précède la grotte de Coracchia.

Arrivée à Bocca d'Oreccia Depuis les bergeries de Terricione : le vallon du Haut-Cruzini

Sur le sentier du Mare a Mare vers Chiusa : le ravin de Coracchia

Nous pique-niquons au bord du Cruzzini naissant un peu avant le confluent du Lagniato, halte-baignade fameuse, les baignoires naturelles ne manquant pas : Arnaud peut y faire tremper à loisir ses petons endoloris. La dernière partie avant l’arrivée sur Chiusa est un superbe sentier en corniche, qui, une fois de plus fait honneur à nos ancêtres bâtisseurs.

Sur le sentier du Mare a Mare vers Chiusa : le vieux sentier du Cruzini Sur le sentier du Mare a Mare vers Chiusa : en remontant vers Chiusa

Je laisse Arnaud et les sacs à Chiusa, et entreprend de regagner Rosazia ; le stop est aléatoire en ce milieu d’après-midi, mais la Providence me fait apercevoir à temps une charmante agent (e ?) du Parc qui accepte de me prendre et de me déposer à la voiture. J’apprécie de terminer ce trek en si agréable compagnie…
Le retour à Bocognano demande un certain temps : il me faut retourner à Chiusa, puis reprendre en sens inverse la D4, belle route, mais point trop rapide. Nous y retrouvons nos « jeunes », arrivés bien avant nous ! C'est au gîte d'étape de la gare de Vizzavona que nous passons la soirée et la nuit, avant d’entamer un autre trek vers les lacs de Vitalaca et de Bracca, et les Pozzi : mais ceci est une autre histoire…

Et quelques réflexions !

Le sentier du Mare a Mare vers Chiusa : déserté par les randonneurs ! Une fois de plus, nous vérifions l’adage, non pas « Paris et le désert français », mais « le GR 20 et le désert corse » ! Même le Mare a Mare, en ce début juillet, semble abandonné. C’est dommage, car tant de superbes parcours redeviennent réellement « sauvages », et il devient bien difficile de venir à bout du maquis qui, lui, reprend ses droits.
Bref, je souhaite que « Corse Sauvage » multiplie par dix, vingt, cinquante la fréquentation de ces chemins perdus…