Massacre du GR 20 par deux "faibles femmes" en juin 2007 ! (Monique JEROME)
Par PhE le lundi 03 septembre 2007, 18:34 - Randonnée - Lien permanent
Lorsque je reçus ce message de Monique en février dernier me demandant des informations pour "deux faibles femmes" à la recherche d'un débrayage possible depuis le GR 20 sur Basseta et Quenza par le Mare a Mare Sud, je ne pouvais imaginer alors que cela déboucherait sur une nouvelle contribution à ce blog à travers l'article reproduit ci-dessous relatant la réalisation effective du périple envisagé alors !
En fait, c'est François Despax qui a permis cette aubaine en renseignant nos deux randonneuses en quête de nouveautés et en leur demandant de nous envoyer le résultat de leurs élucubrations... ce qui fut fait fin juillet dernier à mon retour de vacances sur l'île.
C'est donc avec l'aimable autorisation de son auteur (Monique JEROME) que je retranscris ci-dessous la copie de la lettre que Monique a envoyée à ses amis à son retour de Corse et qui donne le compte-rendu de leur aventure de juin 2007.
Bien entendu, compte tenu des propos tenus par le gîte de Serra di Scopamena à l'encontre de la "trangression" du GR 20 qu'avait effectuée le groupe dont elles faisaient partie, j'espère que ce blog reccueillera les commentaires de ses visiteurs à l'égard d'un tel comportement et de telles opinions. En ce qui concerne la mienne (d'opinion), pas la peine de vous la donner puisque site et blog "Corse sauvage" sont justement issus (entre autres raisons diverses) de ma frustration à ne voir la Corse connue et parcourue que par les sentiers du GR 20 et de n'y rencontrer que des randonneurs conformistes, effrayés à l'idée de sortir des balises blanches/rouges et de leur topo "le GR 20 en 14 étapes".
Ma dernière anecdote à ce sujet ! Par une chaude journée de juillet dernier, vers 11 h du matin, j'ai rencontré un jeune randonneur égaré sur le Cuscione, près des bergeries de Cavallara, m'indiquant avoir perdu le GR 20 (?!?) et cherchant à le rejoindre : il n'avait ni carte, ni topo, ni boussole, ni altimètre et ne savait ni d'où il venait (dernier refuge ?), ni où il allait rejoindre le groupe de jeunes avec qui il était (le refuge qui a brûlé récemment ?!?). Je lui ai bien sûr montré la carte et comment rejoindre le GR 20 sous l'Alcudina par Bocca di Chiralba (trace désormais balisée en jaune vif !) puisqu'il savait quand même qu'il allait vers le Sud (!?!). Il a préféré aller consulter les habitants de la bergerie : sans doute pour cause de la faible confiance qu'il avait en mes indications ou de leur trop grande complexité pour lui. En plus, je faisais l'Alcudina ce jour-là et j'aurais pu l'accompagner. Résultat : je l'ai retrouvé vers 15 h un peu au-dessus des bergeries de Pedinielli lors de ma descente de l'Incudine après un long déjeuner au sommet. Les indications des "bergers" l'avaient fait revenir en arrière par la piste de Cavallare pour rejoindre le GR puis remonter à l'Alcudina qu'il était encore loin d'avoir atteint : épuisé, il s'arrêtait tous les 100 m et a dû arriver bien tardivement à Asinao...
Ce comportement éclaire bien la position ridicule exprimée dans les propos des gestionnaires du site de Serra di Scopamena... qui n'aboutit qu'à voir des moutons en file indienne sur ce sentier, incapables de savoir où ils sont, ce qu'ils voient, ce qu'ils pourraient faire..., et bien loin du comportement autonome recommandé par Corse sauvage !
Quant au sentier du Codi, ce n'est que par une certaine "fréquentation" qu'il restera trace du patrimoine inestimable que constitue ce vieux sentier de transhumance !
Coucou Laurent et amis de la Corse,
Je me décide à vous faire partager notre dernière aventure Corse avant que ce ne soit trop réchauffé.
Donc voici un petit résumé des péripéties les plus intéressantes.
Traversée sur le Pascal PAOLI de Marseille à Bastia. C'est un enchantement de quitter Marseille par une soirée d'été, avec une lumière magnifique sur les forts et les églises qui encadrent le port. Bon là, de plus, j'étais privilégiée car je partais avec Danièle et Gérard, un couple d'amis, Gérard étant retraité de fraîche date de son « job » de commandant à la SNCM. Nous avons donc bu le champagne dans la cahute du commandant : les vacances commençaient bien.
Magnifique arrivée à Bastia dans son écrin de collines, puis départ en voiture pour Vizzavona où nous devons retrouver Dominique, l'amie parisienne. Arrêt à St Florent, avec ses belles maisons anciennes carrément bâties au ras d'une mer turquoise et ses petites cours tranquilles (hors saison). Ensuite, Corte qui escalade fièrement sa colline, puis la Restunica. La Restunica n'est ni une route, ni une vallée, ni une rivière. C'est un léger ruban magique fait d'eaux transparentes et de pins odorants qui relie Corte et ses lauriers-roses au pied de la montagne où sont cachés les lacs. On part de l'été ensoleillé de Corte, on suit ce torrent merveilleux qui recèle à chaque virage des vasques entourées de fleurs où la baignade (fraîche !) est un cadeau du ciel, et on se retrouve sans savoir comment dans les rochers blancs et altiers du bout de la route où la buvette ressemble déjà à un refuge de montagne. On a changé de pays en moins d'une heure.
Arrivée à Tattone « Chez Pierrot » (le Che et sa Monique, Brassens ne fait plus partie de la bande). Nous allons chercher Dominique à « la gare de Tattone » : une maison posée devant les rails, un banc tout seul en face, et autour la forêt. Soirée chez Pierrot animée par Pierrot, le sanglier en daube (ça continue de bien commencer) et des grventistes- « deux étapes en une ».
On y va, c'est-à-dire à E Capanelle. Pas de difficulté sur cette étape de découverte des belles bergeries corses sur laquelle on suit le GR20 tout du long ; évidemment la grimpette finale est un peu durement ressentie en fin de parcours. On a quand même des vrais sacs pour une semaine sur le dos. On a allégé en ne prenant pas de duvet, ce qui est possible puisqu'on ne dormira pas en refuge mais dans des endroits où on nous fournira des couvertures, et on a seulement en ravitaillement le sandwich et le fruit pour le midi qu'on se procure au gîte. Accueil au gîte très, très sympa. Ils font le plein, la salle à manger est très animée.
Mes trois compagnons font l'étape normale du GR20 jusqu'au Col de Verde, je fais l'étape par le lac et le sommet du Renusu avec 2 chamoniards rencontrés dans la soirée. Il faut dire que j'avais dragué un maximum pour trouver une occasion, car j'avais bien vu sur la carte que le parcours par beau temps là-haut devait être génial, et Laurent, tu me l'avais confirmé, je n''ai pas été déçue ,;! Journée magnifique de montagne, passages un peu escarpés qui rendent le chemin vraiment sympa, avec des vues superbes tout le temps, inexplicable sentiment que la Corse est une gigantesque suite de chaînes de montagnes.
La descente dans les genévriers (balisage aléatoire) vers les bergeries de Pozzi est longue, mais quelle récompense en bas : les pozzines sont magnifiques, transparentes et pleines de truites. On ne se lasse pas de regarder les bestioles tournoyer et filer à toute allure dans le courant : on a du mal à redécoller de la sieste
La suite de la descente vers le col de Verde n'est marquée que par des cairns et en forêt. Sans mes compagnons aguerris au repérage, je ne sais pas trop comment je me serais débrouillée (et surtout en combien de temps).
La terrasse du Col de Verde vaut quasiment le voyage, la salle à manger est belle et on mange tout simplement de délicieuses grillades préparées sur le barbecue de l'entrée. Là encore, on rencontre des grventistes-qui-font-deux-ou-trois -étapes-en-une. Leur théorie est que, sur le GR20, il y a les marcheurs et ceux qui sont en vacances. Ambiance.
Les choses se corsent (oui, c'est facile). Pour moi, la plus belle étape de notre semaine (quoique voir le jour 6) mais, si on n'est pas un vrai montagnard, on a forcément du mal, la bonne volonté ne suffit pas : mettre les mains sur le rocher, savoir trouver son équilibre, avoir des articulations entraînées. Laurent, si tu te souviens, nous n'avions pas fait cette étape car il pleuvait et tu avais su nous convaincre de passer par en bas ce qui était très professionnel de ta part. Il y a un pierrier géant à passer qui est un grand moment, des montées dans les rochers, des descentes dans les rochers, etc Ceci dit, mes compagnons sont passés partout en gardant le moral, sans qu'il soit nécessaire de les aider et en admirant tout le temps la beauté du parcours. On a juste mis le temps : 10 heures dont 3 heures de descente sur Cozzano. Une bonne Pietra au gîte de Cozzano et les retrouvailles avec une bande de marcheurs sympas rencontrés la veille ont effacé les souvenirs les moins agréables.
Tout le monde te remercie, Laurent, d'avoir proposé une variante par le Tignosellu plutôt que de remonter sur les crêtes. Tu m'avais dit, car je ne te l'avais pas demandé au départ, "tu sais, après une étape de crêtes, on peut avoir envie d'autre chose, et puis tout dépend de la forme de chacun, du temps qu'il fera". Notre petit groupe aurait souffert à coup sûr d'une deuxième journée de difficultés. L'étape telle que tu nous l'a proposée est très jolie, passage d'abord campagnard avec profusion d'églantines et de très beaux cairns artistiques au-dessus des bergeries de Pinettu, puis montée sympa vers le Tignosellu (le marquage est bien, mais c'est bien d'avoir aussi une carte pour un repérage plus intéressant ), et, cerise sur le gâteau, magnifique baignade dans le ruisseau avec effets de jacuzzi délicieux, vasques profondes où on peut nager jusqu'à une belle cascade, rochers lisses et chauds pour la sieste
Soirée chez Toussaint et Agnès à Basseta, le top du top. Toussaint et Gérard ont découvert qu'ils avaient navigué ensemble, arrosage obligatoire d'une telle nouvelle à la myrte, je devrais dire AUX myrteS.
L'aventure : que ce fut sympa ! Le GR20 s'arrêtait là pour nous puisque la nuitée suivante c'est Asinao, réservation pas possible car refuge Parc, nous n'avons pas de tente et nous marchons à un rythme moyen, donc trouver autre chose. La carte montre la possibilité (entre autres) de rejoindre le Mare a Mare sud à Serra di Scopamena par la station de ski depuis un beau (beau sur la carte, voir la suite) chemin qui longe le ruisseau de Codi. Entre 20 et 25 km, et seulement de la descente douce. Laurent, tu m'avais confirmé que ça semblait sans problème.
Au départ de Bassetta, on rejoint la chapelle San Pietru, puis large piste (ennuyeuse, il doit y avoir des petits chemins plus sympas) jusqu'à un grand croisement où, d'une part, on rejoint le GR20, et, d'autre part, à droite, on prend la direction sud. Ce chemin est un petit filament noir sur la carte : en fait, c'est maintenant une piste sans problème.
Belles vues sur des bergeries et le paysage devient de plus en plus ouvert, puisqu'on descend très doucement et qu'on aborde les espaces du Cuscione. A un moment, on a pris, pour couper un grand virage en montée, un petit sentier très bien cairné, très joli, sur lequel nous avons traversé le Cuscione.
Magique, nous avons adoré ces grands espaces verdoyants, les chevaux sauvages, et quel calme, un petit air léger et parfumé, le bonheur ; nous avons vu de loin un berger qui nous a crié qu'il allait pêcher et nous a souhaité bonne route, et personne d'autre : rien à voir avec la fréquentation du GR20 et on a vraiment apprécié. Jusqu'au site lunaire de la station de ski.
C'est là qu'on a eu des difficultés, car on eu un mal fou à trouver le départ du sentier du Codi : on est trop descendu sur la route, le marquage jaune est vraiment effacé et la première balise ne se voit pas de la route, il a fallu aller « au pif » pour finalement apercevoir un bout de sentier plus bas, on a trouvé quelques cairns et de la peinture effacée. Plus bas, le sentier est envahi par les fougères géantes, piétiné par les cochons, bref, c'est vraiment de la recherche d'itinéraire. Nous ne nous sommes cependant jamais perdus, ce dont nous sommes très, très fiers. Là encore, c'est un très bel itinéraire, très sauvage, avec le Codi en contrebas dont on devine simplement la marque, on est au début presque dans des gorges, c'est un parcours vraiment attachant, beaucoup de fleurs en cette saison.
Arriver dans un petit village après cinq jours de grands espaces nous a beaucoup plu. Au gîte, nous avons raconté notre étape et ON nous a dit texto que « nous n'aurions jamais dû être là », que, quand on était sur le GR20, « il fallait y rester et finir à Bavella », que ça n'était pas du tout une bonne chose de passer d'un circuit à un autre et que c'était donc tout à fait normal que le sentier du Codi ne soit pas en état. Evidemment, ON N'EST PAS DU TOUT D'ACCORD.
Le problème de l'entretien des sentiers est un fait connu et objectif.
De là à dire que les randonneurs doivent s'en tenir aux circuits répertoriés, il y a là quasiment une incongruité par rapport à l'esprit de la randonnée qui ne s'entend pas sans une parcelle d'aventure ; nous marchons depuis longtemps sur tous les sentiers, y compris les GR, y compris avec accompagnateur, et nous bénissons à chaque pas les bénévoles et toutes les entités qui rendent possible l'existence de ces chemins et de ces circuits ; mais qui n'a pas un jour pris un petit filament noir sur la carte (après avoir pris tous les renseignements et précautions nécessaires) ne sait pas encore comme c'est palpitant de devenir un peu plus maître de son chemin, car on se l'approprie mille fois plus si on doit le chercher davantage.
Ensuite, quelle idée de vouloir isoler les circuits les uns des autres ? Nous avons adoré le mix que nous nous étions fabriqué, soit 4 jours en montagne et deux jours dans les villages, avec une étape de liaison qui est vraiment apparue en tant que telle : une longue vallée descendant de la montagne vers la forêt ; quoi de plus naturel ? Je n'ai pas trouvé de documentation sur le ruisseau du Codi, mais on dirait bien que ce sentier est ancien et qu'il permettait aux gens de la montagne de descendre facilement vers les villages du bas.
Voilà ! ceci dit, au gîte de Serra, on a très, très bien mangé.
De Serra à Sainte Lucie de Tallano, jolie étape, pas si tranquille que ça avec le petit col après une belle montée, et surtout, évidemment, là, il faisait chaud.
Sainte Lucie est une étape à recommander. Le gîte est magnifique, une de ces bâtisses corses en granit clair, très simple, très harmonieuse ; la salle à manger est gigantesque et l'espace y est très, très bien exploité : lieux de repos, exposition de photos, belles tablées pour les repas. Et, cerise sur le gâteau, c'est véritablement une étape gastronomique avec des recettes corses aussi belles à voir que délicieuses à déguster.
Notre périple était terminé. Nous ne pensons qu'à une chose : retourner marcher en Corse !
Commentaires
Il faut, bien entendu, encourager ces "débrayages" qui consistent à sortir du GR 20 pour aller parcourir des tronçons parallèles dignes d'intérêt : 1°) Cela diminue la fréquentation hystérique du GR 20 de juin à septembre 2°) Cela permet à certaines régions (comme le Cuscione avec les bergeries de Basseta) de (re-)trouver une clientèle de randonneurs qu'elles méritent.
Peur rétrospective du gérant d'imaginer ses deux "faibles" clientes perdues quelque part du côté du codi? Il faut dire que ce plateau du Cuscione, d'allure débonnaire, présente parfois quelques dramatiques surprises, mais enfin, bon, on n'est pas dans les glaces!
Au contraire, il faut multipier les itinéraires de liaison pour varier les paisirs, et dans le cas du GR 20, pouvoir "détimbrer" la marche si l'on est fatigué.
En tous cas, bravo à nos deux randonneuses, et à leur pittoresque et utile récit; j'espère qu'elles vont remettre ça!
Georges,
Effectivement, je préfère croire que tout cela n'était qu'une blague des gérants du gîte.
En ce qui concerne le balisage jaune de l'Alcudina depuis Chiralbella : je pense en fait qu'il démarre à la bergerie de Croce qui est indiqué comme refuge de délestage du GR 20. Les premières marques jaunes que j'ai vues étaient sur la piste qui passe devant cette bergerie et elles commençaient à sa hauteur (il ne me semble pas en avoir remarquées avant !).
Pour les photos, à l'exception de celle des Pozzi qui est de Monique, les autres sont effectivement de moi et il risque d'y avoir redondance plus tard puisque celles du Cuscione vont me servir pour la description des deux parcours que j'y ai réalisés du 13 au 20 juillet dernier après notre trek du Filosorma.
Aller se perdre du côté du Pic d'Oriente pour aller de Capanelle à Verde -comme le témoigne la photo de la crête du Renoso- milite en faveur des conformistes du GR20 ; il faudrait même embaucher des saisonniers pour ramener les brebis égarées entre les lignes blanche et rouge...
Plus sérieusement, j'imagine que cette photo est signée "Philippe", et bravo à Monique et sa compagne !
Pour ma part, je ne me souviens pas de remarques visant à me faire comprendre que j'étais un inconscient, et pourtant, j'en ai fait des balades sur des itinéraires non balisés... d'ailleurs, les tenants du gîte n'auraient-ils pas été quelque peu pince sans rire ?
Au fait Philippe, il part d'où le balisage jaune vif pour aller à l'Incudine (histoire que je mette ma page sur l'Incudine à jour) ?