Une épopée dans le Haut Cavu : la remontée intégrale du ravin du Finicione
Par PhE le lundi 22 novembre 2010, 19:16 - Ravinisme - Lien permanent
Si l'exploration du Vangone di Lariciu semble évidente, quand on vadrouille dans cette région délaissée du Haut Cavu (Cf. La Haute Vallée du Cavu (1ère partie) et La Haute Vallée du Cavu (2ème partie)), pour aller rejoindre cette emblématique Punta di Bonifacio, une autre exploration semble tout aussi naturelle dans ce massif, celle consistant à remonter le Cavu jusqu'à sa source (présumée ?) par les ruisseaux de Sainte-Lucie et du Finicione jusqu'à Bocca di Castellucciu, juste sous le rocher du même nom qui domine cette partie de la crête dans l'axe du cette vallée...
La remontée de ce ravin fut en ce qui me concerne un combat "épique" (je n'ai pas peur du mot !), livré l'été dernier, pour réussir à parcourir la totalité de cet itinéraire retors et plein de surprises. C'est le récit de cette épopée qui vous est livré dans le long article ci-dessous...
Ravin du Finicione :
Moins spectaculaire et marquant que la Punta di Bonifacio, le rocher du Castellucciu n'en constitue pas moins une des curiosités naturelles des vallées du Haut Cavu en dévoilant la forme cubique caractéristique de sa face Est, entaillée d'une fissure verticale en son milieu, au-dessus et dans l'axe du ruisseau de Sainte-Lucie... Parvenir à le rejoindre depuis le pont IGN300 est donc bien naturel et je ne suis pas le seul à l'avoir envisagé et réalisé. Cet itinéraire m'avait d'ailleurs déjà été suggéré par Charles Pujos (j'aurais dû me méfier ! ) qui l'a parcouru partiellement à l'époque où il explorait cette région.
Son parcours me semblait d'ailleurs plus simple que celui du Lariciu puisque sa pente est beaucoup moins raide et que, en dehors de sa longueur, il ne paraît pas opposer d'obstacles à sa remontée... Toutes illusions qu'il m'a fallu perdre par la suite !
Reconnaissance du 11/08/2010 :
Cette tentative n'était pas à proprement parler une reconnaissance puisque, à l'époque, la remontée me semblait faisable en 4h et l'aller-retour en moins de 7h... C'est donc vers 09h45, par une splendide journée ensoleillée, que nous démarrâmes, Nicole et moi, pour une simple promenade que Nicole se promettait d'arrêter à la première vasque pendant que j'escomptais réaliser l'aller-retour jusqu'au Castellucciu dans un délai raisonnable !
• L'approche jusqu'à la vasque initiale du Finicione :
Départ tranquille vers 09h45 pour atteindre la fin carrossable de la piste RG des ruisseaux Mela/Sainte-Lucie, traverser le Mela par le pont détruit et prendre la suite du sentier de Sainte-Lucie pour arriver au pont IGN300 vers 10h40 : cela ressemble furieusement à l'approche du Vangone di Lariciu et c'est bien la même ! Le Vangone démarre à droite environ 150 m en amont du pont, alors que nous poursuivons plein W en RG du Finicione avec une incursion dans le maquis nous évitant de descendre dans l'eau. Très vite, nous atteignons à 11h une magnifique vasque triangulaire, profonde, fermée par une petite cascade et bordée par deux hautes parois rocheuses permettant des sauts à volonté. C'est suffisant pour Nicole qui s'arrête pour y passer le reste de la journée...
• Vasque initiale - Confluence affluent Quercitella (point IGN400) :
Redémarrage vers 11h15 pour la suite du ravin en commençant par un contournement de cette vasque initiale en RD maquisé pour atteindre une nouvelle vasque-canyon prolongeant la précédente, puis en enchaînant la traversée d'une série de sites variés : lit large à bords plats, lit large à rives pentues, vasques-boyaux sinueuses, cascatelles, dalles inclinées, biefs étroits, toboggans... Aucun obstacle majeur, mais les contournements sont souvent nécessaires, le plus souvent en RD, pour éviter l'eau des biefs : c'est pourtant en RG que je trouvai quelques cairns confirmant d'autres traces (un duvet, des piquets de tentes...) montrant que je n'étais pas seul à parcourir ce tronçon. Sans doute des pêcheurs locaux qui remontent au-delà du pont IGN300 pour trouver les coins tranquilles nécessaires aux truites comme j'en ai rencontré un avec son fils en juillet dernier ! Arrivée à la confluence Finicione/affluent Quercitella au point IGN400 vers 12h.
• Confluence affluent Quercitella (point IGN400)- Confluence Valdu (point IGN478) :
Ensuite, je perdis un peu le fil de la course devant tant de paysages qui s'enchaînaient rapidement et de contournements qui se succèdaient, même si toujours sans obstacle délicat... Le large lit du ruisseau et la couverture végétale peu abondante me permettaient d'apercevoir de temps en temps le Castellucciu, dans l'axe du ruisseau devant moi, ou la Punta di Bonifacio, derrière moi au-dessus de la crête de Pinetu Pianu. Je me souviens seulement être arrivé vers 12h30, après un large virage à droite ramenant au NW, à la première difficulté demandant réflexion, un long bief rocheux à deux étages entrecoupés de cascades et bordés de rives verticales de 10 à 15m. Une première tentative, une escalade en RG le long de l'eau, me permit de vérifier que l'on ne passait pas... enfin, à pied sec ! Retour à l'entrée et recherche d'un passage, toujours en RG (la moins maquisée), en remontant au-dessus de la paroi rocheuse de la rive, des vires semblant permettre une traversée au-delà. Malgré de nombreux essais en plusieurs points faibles, je dus renoncer, au bout d'un long moment, à franchir la paroi : le mauvais rocher, la raideur de la pente et quelques ressauts dangereux en éboulis friable me firent rebrousser chemin. La prudence imposée par le solo et la nécessité de pouvoir désescalader en sécurité me découragèrent d'essayer les quelques pas douteux qui auraient permis la suite du passage... Il ne me restait plus qu'à tenter l'aventure en RD, c'est à dire le maquis ! Une remontée facile mais déjà énervante à l'entrée du bief me permit de gagner une trentaine de mètres d'altitude, puis de traverser en ligne de niveau, le plus au ras de la partie basse rocheuse pour éviter la végétation, sur 200/300m avant d'atteindre la fin du bief et une ligne de descente rocheuse pile en face de la branche Finicione à sa confluence avec le ruisseau du Valdu qui continue à gauche vers les bergeries de Luviu. Déjà 13h05... Plus de 30 minutes pour franchir 200m. C'est clair, je n'avance pas et ce n'est pas aujourd'hui que je terminerai cette course !
• Confluence Valdu (point IGN478) - Vasque-cascade 3 étages :
Le déjeuner, à la vasque de la première cascade, 50m après la confluence, ne me prit que 30mn et je redémarrai à 13h35. Contourner en RG la cascade, qui s'avéra double et dallée de magnifiques roches de granit rose (on se serait cru à Perros Guirrec !) fut facile et me permit d'arriver en 15 mn, au terme d'une partie très sinueuse, à la principale difficulté de ce ravin, une vasque-cascade à trois étages encombrant un virage à 90° à droite. Comme pour le bief précédent, encore pas mal de réflexion et d'essais avant de franchir ce traquenard : traversée le long de l'eau pour jeter un oeil aux deuxième et troisième vasques qu'on ne voit pas depuis l'entrée du passage, vérification qu'on ne pouvait les franchir, choix de la RG pour le contournement (plus court !), recherche d'une voie de montée en évitant au départ un couloir d'éboulis instables qu'il me fallut finalement emprunter... Le couloir me permit de gagner difficilement 80m d'altitude, en évitant éboulements et chutes, puis, en obliquant à gauche, de gagner une échancrure rocheuse de la crête pour redescendre ensuite d'une trentaine de mètres et retrouver le lit du ruisseau vers 14h20.
• Vasque-cascade 3 étages - Point 620m :
Le contournement de la triple vasque-cascade m'avait bien entamé mais l'aventure suivante contribua à m'achever ! Un long et large bief, bordé d'une rive droite verticale entrave la suite du torrent et empêche le passage à pied sec, obligeant ainsi à une incursion dans le maquis de sa RG. Une sorte d'épaisse futaie de chênes-verts entremêlés entrave la progression et implique de multiples zigzags. Je désespérais de ne pas avoir laissé les bâtons de randonnée : non seulement ils ne m'avaient été d'aucune utilité jusqu'ici, mais maintenant, attachés sur le sac, ils ne faisaient que se prendre dans les branches traversières, m'amenant au bord de la dépression nerveuse... Je regrettais amèrement aussi de porter comme d'habitude un short de randonnée : les ronces et le bois dur étaient en train d'emporter les derniers restes de peau de mes jambes, creusées de profonds sillons sanglants...
J'arrivais néanmoins à bout du contournement du bief vers 14h40 et, pour la gloire, je continuais encore à avancer, en terrain plus facile, pour franchir le virage à gauche suivant jusqu'à apercevoir l'aiguille 829m en RD du Finicione. 14h50 ! J'étais à 620m d'altitude, soit 3h40 pour parcourir 3600m et 300m de dénivelé depuis le pont IGN300... Un piteux désastre ! Ecoeuré, je ne me fis pas violence pour faire demi-tour et entamer une descente que je n'envisageais pas sans inquiétude tant j'avais eu du mal à mémoriser les aléas du chemin de montée.
• Le retour :
La descente se passa aussi bien que possible ! Bien sûr, je ne pus éviter ni une grosse colère et l'obligation d'ôter les bâtons du sac pour repasser le sous-bois en sens inverse, ni une chute sur le dos dans la descente des éboulis du contournement de la vasque-cascade trois-étages, mais les autres obstacles ne posèrent pas de problèmes, même si j'eus souvent l'impression de passer par un autre chemin que celui de la montée et de descendre dans le brouillard... Retour vers 17h à la vasque, où Nicole commençait à s'impatienter.
L'énorme avantage de cette vasque en fin de descente du ravin est de pouvoir permettre de se débarrasser par la baignade de toutes les saletés accumulés lors des passages dans le maquis et de délasser les muscles sollicités à la montée... C'est donc seulement à 18h que nous sommes repartis pour revenir au parking à plus de 19h.
Bilan de l'opération : une "promenade" sous-estimée, un horaire trop optimiste, l'intérêt d'emporter un pantalon et des vêtements adaptés aux traversées de maquis, l'inutilité et même l'entrave des bâtons, l'obligation de l'apprentissage du cheminement pour réussir selon un horaire normal... et un rappel de l'humilité nécessaire à ce genre d'entreprise dans tout ravin corse, le plus débonnaire soit-il !
Parcours complet le 15/09/2010 :
Ce n'est finalement qu'un mois plus tard environ que je pus trouver un créneau pour terminer en solo ce ravin ! Le mois de septembre en Corse avait débuté par une période de temps mitigé et il fallut attendre une prévision météo clémente qui ne se présenta pas avant le 12 septembre où je pus réussir le Vangone di Lariciu, puis le Finicione trois jours plus tard par une journée gratifiée d'un ensoleillement maximum et d'une température toujours estivale !
Rebelote,donc, depuis le parking habituel sur la piste Mela/Sainte-Lucie, équipé cette fois-ci d'un pantalon de treillis (la chasse était ouverte en Corse ! ) et sans bâtons de randonnée...
• Parking Mela - Point 620m :
Nulle nécessité de décrire le début du parcours, largement facilité par la "reconnaissance" préalable d'août dernier. Démarrage du parking 08h45, pont IGN300 09h20, vasque début du Finicione 09h30, confluence Finicione/Quercitella 10h12, confluence Finicione/Valdu 10h50, vasque-cascade trois étages 11h07, point 620m 11h30. Soit 2h45 au lieu de 4h35 depuis le parking et 2h10 au lieu de 3h40 depuis le pont IGN300 ! L'initiation, en Corse, cela paye... Tout s'était déroulé comme sur des roulettes en profitant au maximum de l'expérience précédente et sans avoir eu à chercher le meilleur passage, sauf en quelques endroits non mémorisés.
Seul point notable, cette vision rare du décollage d'un splendide rapace (un aigle ?) peu après la vasque initiale du Finicione : un souvenir mémorable que cet envol plané contemplé d'une dizaine de mètres derrière l'oiseau !
• Point 620m - Confluence affluent Calva (point IGN700) :
Le premier virage à droite après le point 620m atteint lors de la tentative d'août me réservait une nouvelle surprise ! Cachée dans le creux du virage, une magnifique cascade d'une quinzaine de mètre de hauteur dresse une muraille de granit gris-rose sur toute la largeur du torrent et oblige à un nouveau contournement en RG pour la franchir. C'est en quelque sorte une miniature du contournement de la triple vasque-cascade précédente, puisqu'il faut aussi remonter un petit couloir herbeux, traverser une courte zone de maquis épais, passer une petite échancrure rocheuse et redescendre de l'autre côté rejoindre le lit du Finicione dans une gorge encombrée d'énormes blocs... Cela me remit bien à l'esprit que l'aventure était loin d'être terminée !
Nouvelle cogitation lorsque j'arrivai à une confluence avec un affluent N-S en provenance des alentours de Punta di Quercitella (point IGN640) avec un nouveau bief entre deux raides rives rocheuses qui obligeait encore à un choix peu évident... Je pris la RG au hasard, mais elle s'avéra vite être une erreur pour la double raison qu'elle obligeait à des équilibres douteux sur des plaques rocheuses instables d'une part et que, le Finicione amorçant un large virage à gauche, la trace y était beaucoup plus longue que sur l'autre rive d'autre part. Demi-tour donc, et nouvel essai sur la RD qui s'avéra finalement aisément accessible et, comme prévu, bien plus courte ! 11h55...
Et les épreuves continuent avec 400m d'une superbe séquence bief rocheux - cascade - dalles - cascade - vasque circulaire - cascade - dalles - vasque-cascade obligeant à de nombreux contournements, changements de rives... mais, curieusement, sans trop de problèmes de choix d'itinéraire (hasard ?). C'est ainsi que j'arrivais à 12h30 à l'un des derniers carrefours de la remontée, la confluence Finicione/affluent en provenance du Monte Calva. Déjà, quelques arbres en travers annonçaient la suite des évènements...
• Confluence affluent Calva (point IGN700) - Confluence branche Castellucciu (point IGN945) :
Après cette confluence, le paysage se modifie sensiblement, passant brutalement à un lit moins aquatique, plus étroit, encombré de gros blocs et traversé de nombreux troncs d'arbres plus ou moins morts... En outre, la végétation devient plus exubérante et se referme fréquemment au-dessus du ruisseau, empêchant la vue au-delà du ravin. Il me fallut un temps infini pour remonter vers l'Ouest cette partie du Finicione, un peu moins sinueuse que les tronçons précédents mais beaucoup plus chaotique. C'était une succession de franchissements de troncs, par dessus ou par dessous, puis de ressauts rocheux, puis d'enchevêtrement terre-racines en provenance des rives. La montée dans ce qui ressemblait à une tranchée végétale ne facilitait pas la marche, même s'il y avait peu de problèmes de recherche de passages. La marche s'effectuait presque face au Castellucciu et, pourtant, je ne pus l'apercevoir qu'une seule fois à l'occasion d'une trouée en RG. Dans ce contexte, c'est seulement vers 13h20 que j'eus l'impression de sortir de cette tranchée en retrouvant un terrain plus ouvert, un lit de ruisseau en dalles de granit, des ruisselets et même quelques vasques à l'amorce d'une boucle vers la gauche amenant sous le Castellucciu. Une nouvelle cascade barrant le ruisseau, ce fut une autre large incursion en RD dans un terrain relativement dégagé qui me permit de monter d'une trentaine de mètres et de contempler le Castellucciu avant de revenir en ligne de niveau dans le lit du torrent après le virage à gauche. Là, ce fut encore le couvert végétal et la tranchée de blocs, terre et racines jusqu'à l'embranchement vers le Castellucciu, signalé seulement par un petit ruisseau perpendiculaire à droite. 13h40 et ce n'était pas fini ! Je n'étais même pas encore sûr de sortir à la vue de la végétation qui se profilait au départ de cette branche du Finicione...
• Confluence branche Castellucciu (point IGN945) - Bocca di Castellucciu (point IGN1141) :
Le début de cette montée finale fut effectivement une joyeuse partie de maquis, mais moindre que ce qui pouvait être envisagé à l'embranchement du Castellucciu : seuls les cinquante premiers mètres demandèrent de traverser des haies de bruyères et de genévriers en restant dans le lit du ruisseau, meilleur point de faiblesse. Ensuite, je débouchai dans un petit boyau rocheux sous la forêt bien dense qui couvre ce versant de Bocca di Castellucciu. Un dernier ressaut, sec car il n'y avait quasiment plus d'eau à cette époque du maximum d'étiage, à contourner par la RD et la suite ne fut qu'une petite marche pentue dans le sous-bois menant au col. On retrouve des traces aux abords du col montrant que des gens viennent voir le ravin par le haut. Fin de la remontée à 14h15 !
• Le retour :
Arrivé au col, il faut bien le dire, j'ai été pris d'une paresse irrépressible à l'idée de devoir redescendre cette galère qui venait de me prendre pas loin de 6h à monter ! La piste forestière permettant de redescendre sur la route du col d'Illarata est toute proche et, à pied, il ne m'aurait fallu qu'un peu plus d'une heure pour descendre et commencer à faire du stop pour retourner à Sainte-Lucie. Il y avait aussi la possibilité d'appeler Nicole par portable pour qu'elle vienne me chercher (??)... Je me demandais vraiment si j'aurais suffisamment de "pêche" pour redescendre ce Finicione... Pour repousser la décision, j'entamai un déjeuner bien mérité, qui contribua à restaurer ma confiance, sinon mes forces, et à décider de redescendre comme prévu pour éviter les complications (stop, transport Nicole, récupération de la voiture restée sur la piste en bas,...).
Cette descente ne fut finalement pas le long calvaire que j'avais envisagé : ce surprenant ravin, même s'il cache les vues environnantes par ses protections végétales, offre tellement de paysages variés dans le lit du ruisseau lui-même qu'il fait oublier les efforts à prodiguer pour le mériter.
Pour information, les horaires de cette descente : Bocca di Castellucciu 14h45, embranchement Castellucciu 15h15, confluence Calva 16h05, triple vasque-cascade 17h15, confluence Valdu 17h40, confluence Quercitella 18h20, pont IGN300 19h10, parking voiture 19h45... Soit la descente complète en 5h.
Cette marche de retour se fit sans incident particulier, ni problème d'itinéraire ou de maquis. Et deux rares rencontres animalières, ajoutées à celle de l'aigle du matin, ne tardèrent pas à me consoler de cette galère :
- D'abord, dans la partie sous le Castellucciu, une magnifique salamandre de Corse aux taches très orangées dont je réussis à rater piteusement la prise photographique alors qu'elle m'avait laissé tout le temps de la prendre avant de se réfugier sous une roche. Finalement, c'est un animal que l'on n'a pas si souvent l'occasion de voir en Corse, en tout cas en ce qui me concerne...
- Ensuite, en redescendant la double cascade aux "dalles Perros-Guirrec", un superbe mouflon mâle en train de boire à la vasque au pied de l'obstacle, soit en gros au point IGN478. Lui ne me laissa pas le temps de sortir l'appareil photo, car il me vit le premier et décampa aussitôt dans la direction opposée en progressant d'une cinquantaine de mètres dans le ravin puis en rejoignant le maquis de la RD.
En conclusion : un itinéraire démoniaque, bien que logique, permettant de compléter la visite de cette région du Haut Cavu vers la source du fleuve et le massif d'U Spidali. Complètement déserté, sauf en ses deux extrémités, le Finicione réserve bien des étonnements, surtout si, comme je le fis, on le sous-estime à la seule vue de sa faible pente et du fait qu'il prolonge le facile ruisseau de Sainte-Lucie : un cours incroyablement sinueux (un circuit F1 du ravin !), de nombreuses confluences avec des affluents en provenance de toutes les crêtes du coin, une végétation exubérante, un maquis douloureux, peu de paysages "extérieurs" car masqués par la végétation, une variété incroyable de paysages "intérieurs" constitués d'obstacles en tout genre, un itinéraire compliqué à trouver pour les choix d'affluents ou de contournements, une faune étonnante à cette altitude... Bien entendu, c'est une belle galère en aller-retour et il vaut mieux "avoir la caisse" pour le parcourir ainsi, mais c'est certainement le moyen le plus efficace pour en profiter pleinement !
Ce ravin est largement comparable à la partie basse et végétale du Pulischellu dont il possède toutes les caractéristiques, la fréquentation du début en moins... et il est aussi aventureux que ce grand ravin de Bavedda, car c'est vraiment une belle bataille que de le remonter sans informations, surtout en solo ! Je n'y ai trouvé quelques traces (cairns ou sentes) que dans la partie inférieure jusqu'à la confluence Valdu et la partie supérieure juste sous Bocca di Castellucciu, mais aucune d'évidente dans la partie médiane, même si les deux grands contournements via les cols rocheux de la triple vasque-cascade et de la cascade de 15m ne semblent pas être totalement naturels. Complètement antinomique du Vangone di Lariciu, pourtant dans la même partie du massif, il n'offre certainement pas les mêmes paysages spectaculaires que celui-ci, mais le raviniste "shooté" ne pourra qu'être comblé par la multiplication sans temps morts des obstacles accumulés tout au long de cette remontée. C'est d'ailleurs un des rares itinéraires corses où j'ai été incapable de mémoriser l'ensemble du parcours et où j'ai eu un mal fou à classer mes photos des trois ou quatre visites que j'y ai faites pour les organiser en chronologie de montée : il est donc possible que vous rencontriez quelques erreurs sur les informations attachées aux photos présentée sur cette page ou dans le diaporama ci-dessous.
Quant à la faune du Haut Cavu, je dois bien dire que j'ai été estomaqué ! Rencontrer le même jour une salamandre, un aigle et un mouflon, ces deux derniers à l'altitude de 400m, c'est pour moi du jamais vu... En particulier, pour les mouflons : rencontrer des mouflons aussi bas semble être une exclusivité Haut Cavu, car ni sur Bavedda, ni sur le Cintu, je n'ai vu ces bestioles en dessous de 1500m. Depuis, Nicole et moi avons même rencontré un beau mouflon mâle le lendemain de la Toussaint, à 450m d'altitude sur un véritable sentier, celui balisé d'I Scarpi, juste à la verticale au-dessus de Taddu Rossu (Tagliu Rossu) : là, ce n'était même plus le Haut mais le Bas Cavu et il était proche des habitations !
Consulter la carte de l'itinéraire sur la carte ci-contre à droite.
Compter environ 6 heures pour la seule montée depuis la fin de la piste carrossable sur la RG des ruisseaux de Mela/Sainte-Lucie et 5h environ pour la descente de retour. Vous risquez de mettre nettement plus de temps au premier essai, tant le cheminement demande de l'apprentissage...
Bien évidemment, il est beaucoup moins fatigant de faire ce ravin en traversée, à la montée ou à la descente, en profitant des deux pistes carrossables aux extrémités : la piste RG Mela/Sainte-Lucie en bas et la piste forestière au Sud du Castellucciu que l'on atteint depuis le col en 30mn en ligne de niveau. Le problème est l'organisation de l'énorme navette de véhicules qui y est associée...
Ci-dessous, le diaporama complet des photos de ce ravin :
Commentaires
@PhE :
Pour compléter mon ancien commentaire, je peux désormais indiquer pourquoi l'IGN a tracé ces deux sentiers inexistants depuis longtemps sur la carte en cours du Haut Cavu.
En effet, maintenant que je dispose des fonds numériques des Plan Terrier 1770-1790 et du cadastre napoléonien 18850-1880, l'examen du cadastre de la région montre bien que ces deux sentiers existaient au XIXème siècle. J'ai comparé les tracés cadastre et IGN : ce sont exactement les mêmes, ce qui veut dire que l'IGN a reproduit ces deux sentiers de l'époque alors qu'ils n'ont plus aucun signe d'existence aujourd'hui. Ces deux sentiers, comme celui plus important passant par les bergeries de Luviu, permettaient sans doute une traversée Sainte-Lucie -> Zonza :-? ...
En souvenir de certains passages des levadas de Madère...
Pour le fun et pour vous changer des "via ferratas" de Corse, un petit tour dans le Sud de l'Espagne avec un "sentier" comme je les aime bien : El Camino del Rey.
Quand on regarde rapidement sur Google, on s'aperçoit que la vidéo du parcours de ce sentier est en fait déclinée en de multiples exemplaires sur tous les sites vidéos de la planète !
Je vous en ai extrait deux versions intéressantes sortant du lot :
(Possibilité de passer en plein écran avec l'icône
en bas et à droite de la barre de contrôle)
@François :
C'est sûr qu'à nos âges il est préférable de faire ce ravin en traversée, compte tenu du délai de montée ou descente et des efforts à faire !
Mais quand on aime ça, pas de problème pour le faire en aller-retour... LOL
En ce qui concerne les deux sentiers indiqués sur la carte IGN à l'Ouest du massif que j'appelle le Haut Cavu : ainsi que je l'ai indiqué dans un de mes articles précédents, j'ai cherché en vain ces deux sentiers et n'en ai trouvé pas même l'ombre du bout d'un reste en 2009 ou 2010... ;:-(
"Quant aux deux sentiers prometteurs d'une exploration aisée du Finicione et du Valdu, c'est simple, ils n'existent tout simplement pas du tout... tout du moins en conclusion de mes recherches personnelles sur le sujet : celui en RG du Finicione devrait partir un peu en amont du pont détruit IGN300 et 45 mn d'exploration dans ce coin ne m'ont rien permis de découvrir, et quant à l'autre, dont un passage traversant la piste est indiqué sur la carte 500 m au Sud de ce même pont, je n'ai même pas pu trouver un espoir quelconque de sortir de la trace dans une végétation totalement inextricable dans ce coin !"
Encore une fois, je te tire mon chapeau pour cette exploration; je ne sais pas qui il faut le plus admirer, toi et ton moral d'acier inoxydable, ou Nicole qui accepte de passer tranquillement une bonne partie de la journée près d'une vasque-cascade, en attendant le retour de croisade de son preux-mari: j'en connais plus d'une qui pèterait les plombs.
Aurai-je le courage, si les circonstances le permettent, de faire ce bout de chemin avec toi? Peut-être, mais alors certainement avec une solution de retour plus tranquille, quitte à travailler de près la navette nécessaire!
Question: on voit sur IGN deux sentiers, l'un en RD, qui se termine en gros dans l'affluent "700", l'autre en RG, en pointillé au début, en trait plein sur la fin, qui semble monter tranquillou pour rejoindre ta trace au niveau du "t" de Castellucciu; as-tu eu l'occasion de les tester l'un ou l'autre, ou bien sont-ils complètement bidon?
A quand le topo-guide de cette remontée, mètre par mètre? Enfin, rassure-toi, même exploré, je ne ferais jamais ce ravin tout seul....